Publié le 12 octobre 2025

Trop d’entreprises se contentent d’informations floues et peu détaillées, lorsqu’il s’agit d’identifier leurs impacts sur les écosystèmes, note le cabinet EY. Un manque d’engagement qui risque de “ralentir l’action internationale pour la protection des écosystèmes”.

Où en sont les entreprises en matière d’intégration des enjeux liés à la protection de la nature dans leurs stratégies d’affaires ? Pas très loin, si l’on en croit le dernier rapport du cabinet de conseil EY sur le sujet. EY a analysé les rapports publiés par les grandes entreprises sur les questions liées à la protection de la nature et des écosystèmes, pour tenter de comprendre comment elles identifient leurs impacts et comment elles progressent sur le sujet. Les rapports de plus de 430 grandes entreprises internationales, dont la capitalisation boursière combinée dépasse 43 000 milliards d’euros, et évoluant dans divers secteurs (biens de consommation, énergie, hôtellerie, technologies) ont été passés au peigne fin.

Résultat ? Les entreprises “cherchent avant tout à améliorer leur réputation en diffusant de belles histoires” notent les auteurs du rapport. Ils pointent ainsi du doigt le manque de précision des données partagées par les acteurs privés quant à leurs impacts sur la nature et le manque de transparence sur la dépendance de leurs activités aux ressources naturelles et aux écosystèmes. “Les entreprises ne semblent pas avoir adopté des pratiques de reporting fiables, conformes aux cadres établis” note Velislava Ivanova, consultante experte durabilité chez EY.

Manque d’informations sur les impacts et les actions

Dans le détail, 93% des entreprises mentionnent désormais la nature et la biodiversité dans leurs rapports annuels ou leurs reportings obligatoires, sous la pression croissante de la société civile et des institutions qui attendent des acteurs privés qu’ils contribuent à la protection des écosystèmes. Pourtant, la part des entreprises qui effectuent un travail sérieux de reporting sur le sujet reste faible : à peine 26% d’entre elles publient ainsi des données détaillées permettant de quantifier leurs impacts sur les écosystèmes et les ressources naturelles, conformément au cadre reconnu par le Groupe de travail sur la divulgation d’informations financières liées à la nature (TNFD). Ce cadre international, issu d’une coalition d’acteurs privés, est pourtant régulièrement décrit par les experts et associations de protection environnementales comme trop peu contraignant en matière de reporting lié à la nature.

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A peine 23% des entreprises publient des informations fiables et détaillées, alignées avec la TNFD, sur la stratégie et les actions mises en place pour réduire leurs impacts sur la nature ou pour mieux les gérer. “La majorité des entreprises en sont encore aux prémices de la compréhension des risques et des opportunités liés à la nature et de leurs implications pour leur stratégie commerciale globale” notent les auteurs, qui déplorent le manque d’actions concrètes mises en œuvre par les acteurs privés.

Le risque de ralentir l’action internationale pour la protection de la nature

D’un point de vue géographique, ce sont les entreprises européennes qui affichent le moins de retard, puisque près d’une sur trois publie des reportings conformes aux standards internationaux en matière de protection des écosystèmes, contre 22% pour les entreprises américaines. Une légère avance qui s’explique notamment par le cadre réglementaire européen plus avancé, et notamment “l’obligation pour les grandes entreprises de publier des reportings dans le cadre de la CSRD (directive sur le reporting de durabilité, ndlr)” notent les auteurs. Cadre réglementaire qui est justement remis en cause en ce moment même par la droite et l’extrême-droite européenne sous la pression de certains représentants économiques, dans le cadre de la loi “omnibus” visant à “simplifier” le Green Deal.

Alors que les scientifiques alertent de façon claire depuis plusieurs années sur la dégradation massive des écosystèmes mondiaux et sur les menaces qu’elle fait peser sur les sociétés et les économies mondiales, ce manque d’engagement des entreprises semble en tout cas particulièrement inquiétant. Pour EY, “le manque d’informations détaillées sur les impacts environnementaux des entreprises pourrait ralentir l’action internationale pour la protection des écosystèmes”, à l’heure où une action urgente est plus que jamais nécessaire.

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