C’était l’histoire dont tout le monde parlait. En 2024, Novo Nordisk, grâce à ses traitements révolutionnaires contre l’obésité, s’imposait comme la première capitalisation boursière d’Europe, détrônant le géant du luxe LVMH. Avec ses blockbusters Ozempic et Wegovy, le groupe danois incarnait l’avenir de la lutte contre le surpoids, dopant son chiffre d’affaires et séduisant les marchés financiers.
Mais un an plus tard, le ciel s’assombrit. Sous pression, Novo Nordisk a annoncé le départ de son directeur général historique, Lars Fruergaard Jorgensen, remplacé par Maziar Mike Doustdar, ex-directeur des opérations internationales. En cause, un retournement de tendance qui surprend les investisseurs. Le laboratoire est désormais talonné, voire dépassé, par Eli Lilly, son grand rival américain. Leur duel se joue sur l’efficacité des traitements : Wegovy ne tient plus la comparaison avec Zepbound, le médicament coupe-faim d’Eli Lilly, jugé plus performant et mieux toléré par les patients. Résultat, les prescriptions stagnent, et les ambitions de Novo Nordisk sont revues à la baisse.
Derrière cette guerre commerciale se cache un débat plus sensible : faut-il médicaliser la perte de poids à grande échelle ? Ces traitements, initialement destinés aux personnes obèses ou diabétiques, ont été détournés ces dernières années par des célébrités et des influenceurs pour maigrir rapidement. Plusieurs stars, dont le très controversé patron de Twitter et fondateur de Tesla, Elon Musk, en ont vanté les mérites sur les réseaux sociaux. Une tendance qui interroge sur la responsabilité des laboratoires dans la banalisation d’injections coûteuses, aux effets secondaires parfois lourds.
Chute en Bourse
Surtout, cet engouement pour les médicaments coupe-faim serait en partie responsable de la pénurie actuelle en France de cartouches d’insuline du laboratoire danois nécessaires aux patients diabétiques. L’Agence française de sécurité du médicament (ANSM) a ainsi signalé dans un communiqué des tensions d’approvisionnement en Europe pour deux cartouches d’insulines, les cartouches Fiasp PumpCart et NovoRapid PumpCart au dosage de 100 unités/mL.
Interrogé par nos confrères des Echos, le Dr Jean-François Thébaut, vice-président de la Fédération française des diabétiques explique : “En 2023-2024, les industriels ont beaucoup augmenté leurs capacités de production de GLP-1 (traitements qui ralentissent la vidange gastrique et diminuent l’appétit, NDR). Cela a réorienté des chaînes de façonnage et de conditionnement d’insuline en conditionnement d’Ozempic et de Wegovy”. En d’autres termes, Novo Nordisk s’est focalisé sur sa poule aux œufs d’or, au détriment de traitements non détournés et destinés exclusivement aux personnes diabétiques.
Les investisseurs se sont vite retournés. En seulement un an, le groupe dont la capitalisation dépassait le PIB du Danemark, a perdu près de 60% en Bourse. Si la chute est lourde, Novo Nordisk compte bien remonter la pente en diversifiant son offre. C’est en tout cas ce qu’attendent les investisseurs du nouveau PDG.
La diète forcée de Weight Watchers, doublé par les médicaments coupe-faim