Publié le 14 mars 2019
ENVIRONNEMENT
La pétition l’Affaire du siècle, catalyseur du réveil écologique des Français, arrive aujourd'hui devant les tribunaux
C’est le Jour J pour l’Affaire du siècle. Les quatre ONG à l'origine de la pétition la plus populaire de France déposent officiellement aujourd'hui le recours contre l'État pour inaction climatique. Très mobilisatrice, l'Affaire du siècle, lancée en décembre, a réussi à structurer un mouvement climatique inédit en France, déclenché par la démission de Nicolas Hulot. Son atout : s'appuyer sur la justice pour faire avancer le climat.

Grève scolaire de la jeunesse, sit-in géant dans la capitale, Marche du siècle... la mobilisation pour le climat n'a jamais été aussi forte en France.
Oxfam, Greenpeace, Notre affaire à tous et la Fondation Nicolas Hulot (FNH), les quatre ONG qui ont lancé en décembre la pétition la plus populaire de France, attaquent officiellement l’État pour inaction climatique. Elles déposent, ce jeudi 14 mars, leur recours devant le tribunal administratif de Paris. Le gouvernement avait répondu à la "demande préalable" des ONG dans une lettre, en février, estimant être à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique. Mais la réponse n’avait pas convaincu les associations. L’affaire se réglera donc devant les tribunaux.
La démission de Nicolas Hulot, un déclencheur
Ce recours et la pétition qui l’accompagne sonnent comme une success story pour les associations. Depuis des années, elles essayent de mobiliser les citoyens sur les questions environnementales. Cette fois, elles ont visé en plein cœur de leur cible. Jamais une pétition n’avait recueilli autant de signatures en France, plus de deux millions. "Clairement, il y a eu un avant et un après. On ne s’attendait pas à avoir un tel impact", commente Noélie Coudurier responsable de campagne chez Oxfam.
Le succès de la pétition est certes dû au travail des ONG mais également à une conjoncture de facteurs. D’abord la multiplication des évènements climatiques extrêmes, ensuite la démission de Nicolas Hulot en août dernier. En lâchant son poste, le ministre de la Transition écologique et solidaire a créé un sursaut écologique.
L'Affaire du siècle a structuré les mouvements
L’Affaire du siècle a servi de catalyseur. En pleine crise des Gilets jaunes, le pari était pourtant risqué. "On a hésité à la lancer à ce moment-là, sachant que la taxe carbone était le déclencheur du mouvement. Et finalement, tout le monde a compris que la justice sociale et la justice climatique allaient de pair. L’Affaire du siècle a aidé à la structuration d’une alliance notamment avec les gilets jaunes et les mouvements de désobéissance civile", analyse Marie Pochon, coordinatrice de Notre Affaire à tous.
Et de fait, aujourd’hui, les liens sont bien créés. La première vidéo qui a lancé la pétition rassemblait des youtubeurs, des célébrités, des militants… mais pas de Gilets jaunes. Pour l’Acte 2 qu’est la Marche du siècle, une manifestation organisée le 16 mars, une des figures des Gilets jaunes, Priscilla Ludosky, apparaît à l’écran et appelle à la mobilisation car "les plus fragiles sont les plus touchés".
S'appuyer sur la justice, une démarche novatrice en France
Au-delà de cette convergence des luttes, ce qui semble avoir pesé dans le succès de l’Affaire du siècle, c’est son originalité. Habituellement, les pétitions des associations environnementales en France réclament à l’État plus de mesures ou d’ambition dans la lutte contre le réchauffement climatique mais sans s’appuyer sur la justice. "On fait un travail de plaidoyer depuis des années, il fallait trouver un moyen légal et suffisamment impactant pour mobiliser en dehors de nos cercles militants habituels", avance Noélie Coudurier.
Reste à ne pas décevoir. Le temps de la justice est long et l’espoir suscité par l’ampleur de la mobilisation climatique ne doit pas retomber. Le tribunal administratif a deux ans pour émettre un jugement. "L’outil juridique ne fait pas tout", rappelle Marie Pochon, "il faut une mobilisation forte". Et les organisations ont employé les grands moyens. Depuis le 15 février, jour du lancement de la grève des jeunes pour le climat, jusqu’au 17 mars, la France connait une forte mobilisation. Pendant ce Printemps climatique, tous les citoyens sont appelés à descendre dans la rue.
Marina Fabre, @fabre_marina