Travailler moins pour s’adapter au changement climatique. C’est le message transmis par le gouvernement Maduro aux Vénézuéliens. Depuis le 24 mars, tous les employés des services publics ont reçu l’ordre de réduire leurs horaires de travail. Ils ne travailleront donc que de 8h à 12h, et ce, pendant au moins six semaines.
Ministerio de Energía Eléctrica de Venezuela anuncia este #23mar la reducción de horario laboral por “emergencia climática”.
Es curioso porque hablan de “emergencia climática”, “sequía”, “calentamiento global”, pero no tienen información oficial actualizada 🤨 pic.twitter.com/P550Wz84Bm
— Rosmina Suárez Piña (@sciencelover_rs) March 24, 2025
Les fonctionnaires bénéficieront également d’un jour de congé pour un jour travaillé, réduisant à trois les jours d’ouverture des services publics, sauf ceux chargés des services essentiels comme la santé ou l’éducation. Le gouvernement a également demandé à la population vénézuélienne de réduire sa consommation d’énergie, notamment en ajustant “la température des climatiseurs à 23°C, en profitant de la lumière naturelle et en débranchant les appareils électroniques” lorsqu’ils ne sont pas utilisés.
Économiser l’énergie pour économiser l’eau
Si cette mesure peut prêter à sourire de ce côté de l’Atlantique, elle témoigne surtout de l’urgence pour le Venezuela d’économiser l’eau. 64% du mix électrique du pays provient en effet de l’hydroélectricité – et le reste des fossiles. “En raison de l’urgence climatique qui a entraîné une hausse des températures dans le monde entier, nous sommes confrontés à un événement météorologique qui affecte le niveau d’eau des réservoirs produisant de l’électricité dans la région andine”, a déclaré le gouvernement.
Ces dernières semaines, les pannes de courant ont été de plus en plus nombreuses et ont touché l’intégralité du pays, y compris la capitale Caracas. Le pays est frappé par une sécheresse intense, mettant à mal les réserves en eau du pays, dont celle de Guri, où se trouve le troisième plus grand barrage du monde. Situé dans l’État de Bolivar, cette infrastructure permet d’alimenter le pays en eau et en électricité. En effet, la centrale électrique, gérée par la société Electrificación del Caroní, produit annuellement environ 50 térawattheures, soit 75% de la production nationale d’électricité. Et bien que l’administration Maduro rechigne à fournir des détails concernant son état actuel, certains rapports – comme celui de Corpoelec – indiquent qu’il est proche du niveau minimum pour fournir de l’électricité.
Deux phénomènes peuvent aujourd’hui expliquer pourquoi le pays se retrouve dans un tel état de sécheresse. En janvier 2024, le groupe de recherche climatique du World Weather Attribution a rapporté que la sécheresse à laquelle sont confrontés le Venezuela et d’autres pays de la forêt amazonienne, en raison du phénomène El Niño, est pire que lors des périodes précédentes en raison des effets du changement climatique. À cela, il faut ajouter que l’exploitation de mines de fer installées non loin du barrage de Guri met également à mal les réserves en eau de la région.
Des sécheresses récurrentes
Selon certains observateurs, cette crise de l’électricité n’est pas que la conséquence de la sécheresse mais s’explique aussi par la vétusté des infrastructures énergétiques, le manque d’investissements dans leur entretien, la perte de personnel qualifié et la corruption qui touche le pays. “La question climatique est un prétexte pour masquer la négligence du gouvernement. Il a surexploité les réservoirs plus de 16 heures par jour pendant neuf mois. Conséquence ? Il les a vidés. Ces réservoirs sont conçus pour fonctionner à pleine capacité six à huit heures par jour”, accuse José Aguilar, spécialiste des systèmes de production d’électricité, auprès du média Correo del Caroni.
Ce n’est pas la première fois que le pays est confronté à une telle situation. En 2024, 69% des foyers vénézuéliens avaient été confrontés à des coupures de courant constantes, et 17,1% avaient subi des interruptions quasi quotidiennes, a rapporté sur X l’ONG HumVenezuela.