Publié le 20 octobre 2025

TotalEnergies est contraint par la justice de désinstaller son terminal méthanier flottant, ancré au Havre depuis l’automne 2023, en pleine crise énergétique. Censé répondre à un risque de pénurie de gaz, il a en réalité été très peu utilisé l’an passé. Ce qui permet au tribunal de remettre en question son bien-fondé.

C’est un revers pour l’entreprise TotalEnergies. Le tribunal administratif de Rouen, saisi par l’association Ecologie pour Le Havre, a estimé, dans une décision rendue le 16 octobre dernier, que le terminal méthanier flottant installé au Havre par la major à l’automne 2023 n’a plus de raison d’être et doit être retiré. Le Cape Ann, un navire doté d’équipements de regazéification, avait été ancré en octobre 2023 dans le port du Havre, afin de sécuriser l’approvisionnement du pays en gaz naturel liquéfié (GNL). Son installation avait été décidée dans le contexte de la guerre en Ukraine et des craintes de pénuries d’énergie, avec l’autorisation des pouvoirs publics de rester à quai pendant cinq ans.

Mais le projet a fait l’objet de multiples recours en justice portés par des associations de défense de l’environnement au nom de la lutte contre le réchauffement climatique. Elles ont finalement obtenu gain de cause. Le tribunal administratif de Rouen enjoint au gouvernement d’abroger l’arrêté autorisant l’installation du terminal “dans un délai de deux mois”. “C’est une grosse victoire”, celle “du pot de terre contre le pot de fer“, s’est réjoui Julien Bayou, avocat de l’association Ecologie pour le Havre (EPLH), à l’origine du recours.

Un terminal très peu utilisé

La menace d’une pénurie d’énergie est aujourd’hui écartée et ne justifie plus la présence et l’exploitation du terminal, plaidait EPLH. Entre janvier et novembre 2024, il n’a été utilisé qu’à 15% de ses capacités. Il n’a reçu aucune nouvelle livraison de gaz depuis août 2024 et n’a plus injecté de gaz dans le réseau depuis le 21 septembre 2024, précise encore l’association. “Aucune de ces allégations, précises et concordantes, et assorties de pièces de nature à établir leur exactitude, n’ont été contestées, dans le cadre de la présente instance, par le ministre chargé de l’énergie ou par la société TotalEnergies LNG Service France”, commente le tribunal qui conclut donc que la demande d’EPHL est bien fondée.

En 2022, plus de 120 députés et sénateurs de gauche, dont Julien Bayou (alors élu des Verts), avaient saisi le Conseil constitutionnel contre le projet de loi sur le pouvoir d’achat dans lequel s’inscrivait la mise en service du terminal méthanier. Les Sages avaient autorisé le terminal, uniquement “dans le cas d’une menace grave sur la sécurité d’approvisionnement en gaz”. Ils avaient ajouté que “la préservation de l’environnement (devait) être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la nation”.

En 2023, l’ONG Greenpeace, qui avait perturbé la mise en service du terminal méthanier, avait publié un rapport remettant en question l’utilité réelle du projet dans un contexte de réduction de la consommation de gaz, et taclant au passage les avantages accordés à TotalEnergies pour son installation et son exploitation. De fait, la demande en gaz a encore baissé de 5,5% en 2024 en France bien que TotalEnergies mise sur le GNL américain, devenant même son premier exportateur. Le groupe comme le ministère chargé de l’énergie conservent la possibilité de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’Etat.

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