C’est une nouvelle polémique qui vient entacher les promesses écologiques des Jeux Olympiques de Paris 2024. Pour répondre à ses engagements de durabilité, le Comité d’organisation (Cojop) de la compétition s’était engagé à ne pas climatiser les bâtiments du village olympique. Le quartier, qui doit accueillir les sportifs du monde entier, a été conçu en conséquence, afin d’assurer le confort de ses habitants même en cas de fortes chaleurs. Un argumentaire qui n’a visiblement pas convaincu une partie des délégations. Selon une enquête du Washington Post, plus de 3 000 athlètes prévoiraient ainsi d’équiper leur hébergement avec leur propre climatiseur.
Parmi les vingt nations participantes contactées par le média américain, huit ont en effet confirmé prévoir l’installation de systèmes d’air conditionné dans “une partie ou la totalité” des dortoirs de leurs sportifs. Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, le Canada, l’Italie, l’Australie, la Grèce ou encore le Danemark sont concernés. Le Japon pourrait également y faire appel, comme annoncé en décembre 2023 lors d’une conférence de presse, mais aussi la Chine dont l’usage domestique de la climatisation est en forte croissance, estime le quotidien.
“23-26°C au moment le plus chaud de la journée”
Le comité d’organisation assure pourtant avoir prévu de nombreuses mesures pour rafraîchir les chambres des participants. Conception bioclimatique des quartiers, planchers réversibles, isolation et végétalisation des immeubles, orientation des fenêtres, brise-soleils… “Grâce à l’ensemble des mesures prises au niveau de la conception même des bâtiments, et selon une étude que nous avons lancée sur l’impact d’épisodes caniculaires sur le village des athlètes, nous atteignons l’objectif cible de 23-26°C au moment le plus chaud de la journée”, explique le Cojop auprès du média 20 minutes. Malgré ces aménagements, complétés par la mise à disposition de plus de 8 000 ventilateurs, le sujet du confort des athlètes reste sensible.
Face aux craintes des nations participantes, qui redoutent l’impact d’une potentielle canicule sur les performances de leurs sportifs, les organisateurs ont ainsi concédé à autoriser l’usage de climatiseurs pour les pays qui le souhaitent, revenant sur leur ambition initiale. Les délégations pourront commander les appareils directement auprès du comité d’organisation via un catalogue d’options, pour la somme de 300€ par unité. D’autres les apporteront par leurs propres moyens. “Nous les amènerons. Et nous les ramènerons en Grèce”, affirme au Washington Post Alexandra Palli, présidente du comité olympique grec pour la durabilité environnementale.
Une polémique de plus
Ce rétropédalage est source d’inégalités entre les pays, certains ne pouvant supporter le coût additionnel de cette installation, mais aussi de pollution. Car on le sait, l’utilisation de la climatisation participe à l’aggravation du changement climatique. Cette dernière peut “déclencher une consommation d’énergie importante et aggraver le stress thermique extérieur”, indiquaient en 2020 plusieurs spécialistes, dont la climatologue Valérie Masson-Delmotte, dans une étude publiée dans Environmental Research Letters. En outre, les systèmes d’air conditionné fonctionnent avec des fluides frigorigènes, des gaz qui une fois émis dans l’atmosphère ont un fort pouvoir réchauffant.
Une controverse de plus pour des JO qui peinent à maintenir leurs ambitions environnementales et sociales. Il y a quelques jours, l’association France Nature Environnement dénonçait notamment les stratégies de “greenwashing” du partenaire et distributeur de boissons exclusif de la compétition, Coca-Cola. Si la marque souligne la mise à disposition de fontaines et d’éco-cups durant toute la durée de l’événement, un document confidentiel révèle que les trois quart des boissons distribuées proviendront finalement de bouteilles de plastique. Un dispositif qui pose question alors que le Cojop s’était fixé pour objectif de réduire de moitié l’usage du plastique à usage unique par rapport aux Jeux de Londres de 2012.