Publié le 17 avril 2024

Un rapport d’experts met en évidence l’impact climatique colossal des Jeux Olympiques de Paris 2024. Les lacunes de la stratégie climatique du comité d’organisation et les incohérences de sa communication sont également épinglées.

Le compte à rebours est lancé mais les controverses perdurent autour des Jeux Olympiques de Paris 2024. Les conséquences écologiques des Jeux Olympiques (JO), et notamment leur impact climatique, viennent ainsi d’être pointés du doigt dans une analyse publiée par le Carbon Market Watch et éclaircies, collectif indépendant de recherche sur les questions écologiques.

Malgré des “efforts louables” mis en œuvre par le comité d’organisation des JO, le rapport note que la “stratégie climat de Paris 2024 visant à minimiser les émissions carbone de l’événement est incomplète”. L’organisation prévoit que 1,5 millions de tonnes de CO2 seront émises lors des quelques semaines de l’événement, soit autant que 150 000 Français pendant 1 an. “Les Jeux Olympiques ne peuvent être véritablement compatibles avec les objectifs de l’Accord de Paris qu’à condition que leurs opérations globales soient fondamentalement réformées” analyse ainsi le rapport.

Les lacunes des JO en matière climatique

Le comité d’organisation affichait pourtant la volonté de diviser par plus de deux l’empreinte carbone des JO par rapport aux éditions précédentes, avec la mise en place d’objectifs chiffrés et d’une stratégie climatique relativement détaillée. Pour Guillaume Kerlero de Rosbo, membre du collectif éclaircies, le comité a “fait un travail honorable et une partie de sa stratégie climat pourra inspirer de futures éditions.” Le comité d’organisation s’était notamment engagé à des efforts significatifs en matière de construction des infrastructures, en misant pour plus de 95% sur des constructions existantes ou temporaires. La stratégie climatique des JO misait également sur le volet alimentation, en proposant tout au long de l’événement des repas à plus faible empreinte carbone (végétariens notamment).

Mais efforts ne visent que “30% (environ) des émissions de GES de l’événement” selon Guillaume Kerlero de Rosbo, qui ajoute “même si un plan d’action existe aussi sur les autres postes d’émissions, les actions évoquées ne sont pas suffisamment claires et ambitieuses.” Les enjeux liés au transport des spectateurs, ainsi que les stratégies d’achats non-alimentaires (goodies par exemple) restent des “impensés” de la stratégie climatique de Paris 2024. “Ce sont pourtant les enjeux qui comptent le plus dans l’empreinte carbone de ce type d’événements” analyse César Dugast, lui-aussi membre du collectif éclaircies et consultant spécialisé dans les enjeux carbone. Le rapport pointe également “le manque de méthodologie détaillée” dans l’élaboration de la stratégie climatique, et le manque de “suivi complet et de transparence” dans la mesure des impacts climatiques liés à l’événement.

Les sponsors et la communication pointés du doigt

Plus globalement, c’est la stratégie de communication autour des enjeux climatiques qui est pointée du doigt. D’abord, car Paris 2024 a longtemps communiqué sur des Jeux “neutres en carbone” voire “climate positive”. Deux “affirmations trompeuses” que le comité a fini par abandonner. La communication des Jeux Olympiques de Paris 2024 est également floue en matière “d’achats de crédits carbone censés compenser les émissions “inévitables” des jeux.” La stratégie climatique des Jeux ne fournit ainsi aucun détail sur “le type de projets financés” ou sur l’efficacité de ces systèmes de compensation, provoquant ainsi “une perte de crédibilité de l’ensemble de la stratégie climatique.”

Enfin, les analystes pointent “l’absence de critères climatiques lors de la sélection des sponsors” : “Au moins 6 sponsors de l’événement (ArcelorMittal, AccorHotels, Air France, Danone, Saint Gobain, VINCI) sont sur une trajectoire climat incompatible avec l’Accord de Paris” dénonce ainsi Guillaume Kerlero de Rosbo. Du côté du Comité d’Organisation, on explique avoir demandé des garanties aux sponsors des Jeux sur le plan climatique. Un exemple ? “ArcelorMittal a réalisé toutes les torches des JO à partir d’acier recyclé.”

On n’arrivera pas à la hauteur des objectifs climatiques en restant dans le modèle actuel des JOtranche César Dugast. Pour des JO compatibles avec nos objectifs climatiques, il s’agit donc de repenser ce modèle de façon radicale. “On pourrait imaginer sortir du méga-événement centralisé dans une seule ville, pour plutôt répartir les disciplines dans différents pays, développer les fanzones décentralisées” Objectif : “recruter plus de spectateurs localement, créer une expérience enrichie et élargir des Jeux, et réduire la place de l’avion dans les déplacements.”

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