Publié le 17 mai 2024

Brésil, Dubaï, Chine, Afghanistan, Kenya, Philippines : les événements extrêmes – inondations meurtrières et chaleurs records – se multiplient aux quatre coins de la planète depuis plusieurs semaines. Dans de nombreux cas, le rôle direct du changement climatique ne fait aucun doute.

Comme un air de fin du monde. Depuis plusieurs semaines, les images d’inondations meurtrières aux quatre coins de la planète déferlent sur nos écrans. Indonésie, Chine, Afghanistan, Emirats arabes unis, Kenya, Brésil, des centaines de milliers de personnes ont été touchées, des récoltes ravagées et des infrastructures emportées. Si ces événements extrêmes ne sont pas toujours directement liés au réchauffement climatique, ils interviennent dans un contexte de changement climatique qui accentue la fréquence et l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes.

“Les précipitations extrêmes récentes sont conformes à ce que l’on attend dans un climat de plus en plus chaud“, confirme à l’AFP Sonia Seneviratne, membre du Giec, le groupe d’experts du climat mandatés par l’ONU. Et malgré les variations naturelles comme le phénomène El Niño, “la hausse observée, sur le long terme, des fortes précipitations est due au changement climatique induit par les humains”, tranche-t-elle.

A Dubaï et au Brésil, l’ombre du changement climatique

La science de l’attribution, créée en 2004, permet justement d’examiner au cas par cas l’influence du changement climatique sur chacun de ces événements extrêmes. Pionnier de cette approche, le réseau World Weather Attribution (WWA) lancé en 2014, a ainsi conclu que les pluies diluviennes qui se sont abattues sur Dubaï, et qui ont plus largement frappé les Emirats Arabes Unis et Oman en avril ont “très probablement” été exacerbées par le réchauffement climatique. A Dubaï, la pluie de deux années normales était tombée en seulement une journée, dépassant tous les précédents records de précipitations.

Les Émirats arabes unis et Oman sont pourtant situés dans une région dite hyper-aride, avec en moyenne très peu de précipitations. Mais il existe une très forte variabilité d’une année à l’autre, sous l’influence notamment de El Niño. Les experts du WWA sont toutefois formels : l’événement d’avril 2024 a été 10 à 40 % plus intense qu’il ne l’aurait été s’il s’était produit au cours d’une année El Niño, dans un climat plus frais de 1,2°C, qui correspond au réchauffement de l’atmosphère depuis l’ère préindustrielle. En outre, alors que des hypothèses pointaient l’ensemencement des nuages, les scientifiques affirment que cette pratique “n’a eu aucune influence significative sur l’événement”.

ClimaMeter, un autre outil d’attribution rapide des événements météo extrêmes développé au sein du laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), estime pour sa part que les inondations au Brésil peuvent elle aussi être “principalement attribuées au changement climatique provoqué par l’homme” avec une augmentation des précipitations dans l’État du Rio Grande do Sul de 15%. A contrario, en Chine, “les inondations ont probablement été influencées à la fois par le changement climatique d’origine humaine et par la variabilité naturelle”, constatent les scientifiques.

Des chaleurs impossibles sans la crise climatique

Avant ce déferlement d’inondations, l’hémisphère Sud a croulé sous des chaleurs extrêmes, entraînant la fermeture d’écoles. Là encore, plusieurs études d’attribution menées par le WWA ont permis d’analyser précisément le rôle du changement climatique dans ces événements. Ainsi en Asie, la vague de chaleur de cette année aurait été “impossible” aux Philippines sans la crise climatique et a été rendue cinq fois plus probable en Asie du Sud et de l’Ouest à cause du changement climatique. La chaleur extrême a été rendue 45 fois plus probable en Inde et cinq fois plus probable en Israël et en Palestine. “À Gaza, la chaleur extrême a aggravé les conditions de vie de 1,7 million de personnes déplacées”, notent les chercheurs.

Fin mars et début avril 2024, une région du Sahel (notamment au Sénégal, en Guinée, au Mali, au Burkina Faso, au Niger, au Nigeria et au Tchad) a connu une chaleur extrême, avec des températures maximales atteignant plus de 45°C (48,5°C au Mali) et des températures minimales de 32°C au Burkina Faso. “Cette vague de chaleur extrême au Sahel qui a frappé une population très vulnérable à la fin du Ramadan n’aurait pas eu lieu sans le changement climatique”, affirme le WWA, qui prévient que ces tendances se poursuivront avec le réchauffement futur. D’où l’importance de mettre en place des politiques d’adaptation pour renforcer les infrastructures critiques telles que les systèmes d’électricité, d’eau et de santé.

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