Publié le 16 juin 2025

Les sénateurs ont finalement rejeté la proposition de loi sur la taxe Zucman, qui visait à instaurer un impôt plancher sur le patrimoine des plus riches. Les députées écologistes portant le projet de loi prévoient cependant de le relancer à la rentrée, tandis que le gouvernement continue de travailler sur sa propre proposition.

Le Sénat a finalement rejeté la “taxe Zucman”, cet impôt sur le patrimoine des Français les plus riches inspiré par l’économiste Gabriel Zucman. La proposition de loi déposée par des députés écologistes avait été adopté le 20 février à l’Assemblée nationale. Elle proposait d’instaurer un impôt basé sur le patrimoine des plus riches, ceux dont la fortune excède les 100 millions d’euros et qui, par le jeu de l’optimisation fiscale, parviennent à échapper en grande partie à l’impôt. Déjà rejeté en commission par les sénateurs, le vote final au Sénat s’est soldé par 188 voix contre le texte, contre 129 pour. “Il nous a manqué 30 voix, déplore Gabriel Zucman sur LinkedIn. L’impôt plancher sur le patrimoine a été adopté par l’Assemblée nationale. Il est plébiscité par les Français. Sa logique économique est limpide.

La taxation des hauts patrimoines reste donc pour le moment au point mort, mais elle pourrait revenir plus tard. “Le rejet au Sénat de l’impôt plancher sur la fortune est loin de signer son arrêt de mort“, écrit ainsi sur Bluesky la députée écologiste Eva Sas, qui portait la proposition de loi avec Clémentine Autain. Elle prévoit de proposer à nouveau la taxation à la rentrée, notamment au moment du projet de loi de finances 2026.

Un projet concurrent par le gouvernement

Le gouvernement continue également de travailler sur son propre dispositif visant à contrer la suroptimisation fiscale des plus riches. Plusieurs pistes sont à l’étude selon des révélations des Echos, l’une d’entre elles tenant la corde. Elle viserait à mettre en place un impôt plancher égal à 0,5% du patrimoine des ménages, c’est-à-dire que la somme de tous les impôts payés par le foyer devrait atteindre au minimum ce taux, sans quoi il devrait payer la différence.

Le principe de l’impôt anti-optimisation du gouvernement est assez proche de la taxe Zucman, qui est aussi un impôt plancher mais avec un seuil fixé à 2%. Plusieurs différences existent néanmoins. Outre le taux de l’imposition “sur lequel on pourrait discuter et on pourrait même s’accorder“, affirme la députée Eva Sas dans une interview à France Info, ce sont surtout les modalités de la taxation qui diffèrent. Le projet du gouvernement prévoit en effet plusieurs exonérations qui pourraient ne pas être incluses dans le patrimoine taxable, comme les actifs professionnels, la prise de participation dans des entreprises innovantes ou des PME, les œuvres d’art, etc.

Le risque d’exil fiscal

Le problème de ce à quoi réfléchit le gouvernement, c’est qu’il va exclure les avoirs professionnels, concrètement ce sont des actions d’entreprises qu’on met dans des holdings patrimoniales, déplore Eva Sas sur France Info. Cela représente à peu près deux tiers du patrimoine des plus riches. On manque donc la cible et on aura une mesure cosmétique avec plein d’exemptions comme l’était l’ISF.”

Le nombre de personnes concernées varie également sensiblement entre les deux projets. La taxe Zucman cible ainsi les personnes dont le patrimoine dépasse les 100 millions d’euros, soit environ 1 800 Français. Elle aurait permis de générer un rendement fiscal de l’ordre de 20 milliards d’euros. Le projet du gouvernement vise des patrimoines bien moins élevés, de l’ordre de 2 millions d’euros selon les Echos soit plusieurs dizaines de milliers de personnes, mais pour un rendement fiscal bien moins élevé aussi, de l’ordre de 2 milliards d’euros en raison des exemptions.

La crainte demeure toujours le risque d’exil fiscal des personnes les plus riches. “La taxe Zucman a un sens si elle est mondiale, c’est pour ça que je me suis battu avec le président Lula et à l’époque le président Biden, pour la faire au niveau de l’OCDE, défendait Emmanuel Macron sur TF1. Est-ce que vous pensez que si la France toute seule met une taxe sur les patrimoines de plus de 100 millions d’euros, les gens vont gentiment rester pour être taxés ?” Un argument que balaie Gabriel Zucman selon qui les études réalisées sur le sujet montrent un nombre de départs très faible.

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