Publié le 4 décembre 2024

Rien ne semble arrêter Elon Musk. Homme le plus riche au monde, proche de Donald Trump, le pouvoir du patron de Tesla, SpaceX, et X n’en finit pas de grandir. Mais la justice pourrait bien le rattraper. Alors qu’une juge vient de retoquer sa rémunération extraordinaire de 56 milliards de dollars chez Tesla, ce sont les conflits d’intérêts qui pourraient bien ralentir son ascension au sein du gouvernement Trump.

Elon Musk, l’intouchable. Ou presque. L’homme le plus riche au monde ne pourra finalement pas toucher son énorme plan de rémunération de 55,8 milliards de dollars attribué par Tesla, entreprise qu’il dirige. C’est la juge du Delaware, dans l’est des Etats-Unis, Kathaleen McCormick qui a retoqué cette maxi-enveloppe, “la plus grande rémunération potentielle jamais observée sur les marchés cotés”, avait-elle déjà estimé lors de son premier jugement en janvier dernier.

Pour bien comprendre, il faut revenir en 2018 lorsque la spectaculaire rémunération d’Elon Musk avait été approuvée à la fois par le conseil d’administration et les actionnaires. Face à cette somme astronomique, un petit actionnaire de Tesla, Richard Tornetta était monté au créneau. Sa plainte portait notamment sur le manquement aux obligations fiduciaires d’Elon Musk en tant qu’actionnaire de contrôle et sur son “enrichissement injuste”. En janvier 2024, la juge Kathaleen McCormick avait constaté un manque d’informations sur le plan de rémunération vis-à-vis des actionnaires. Elle avait également pointé le manque d’indépendance du conseil d’administration, sous contrôle d’Elon Musk.

Crise ESG pour gouvernance

Mais l’homme d’affaires avait voulu passer en force. Quelques mois plus tard, en juin 2024, il a, à nouveau, soumis aux votes des actionnaires son plan de stock-options de 56 milliards. Accueilli en véritable rock-star sous les “Elon, Elon !”, sa résolution avait été largement validée à 72%. Malgré quelques contestations comme celle de James McRitchie, fondateur de CorpGov.net, qui voulait plutôt préparer “un futur qui ne dépende pas de la dictature d’un superhéros”. “Nous devons passer d’un conseil d’administration dominé par des amis et de la famille, à un conseil d’experts et de spécialistes” avait-il conseillé.

Mais voilà que 6 mois après, la saga continue. Kathaleen McCormick a de nouveau rejeté le plan de rémunération d’Elon Musk arguant que “Tesla et Musk auraient pu proposer un nouveau plan qu’ils jugeaient juste et accepter que la cour n’annule qu’une partie” du montant initialement attribué, a poursuivi la juge McCormick. “Au lieu de cela, ils ont tenté de faire approuver le même plan en s’appuyant sur des théories fumeuses sur la loi du Delaware”, a regretté la magistrate. Sur X (anciennement Twitter), racheté par Elon Musk, le milliardaire a écrit : “Les actionnaires doivent contrôler les votes des entreprises, pas les juges”, annonçant qu’il allait porter l’affaire en appel devant la Cour suprême.

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Des conflits d’intérêts à l’horizon

Les juges sont-ils le seul rempart à l’ascension extraordinaire d’Elon Musk et de ses dérives ? Même sans sa rémunération de 56 milliards de dollars, l’homme d’affaires bat tous les records avec une fortune dépassant les 350 milliards de dollars, selon l’indice Bloomberg. En seulement un an, Elon Musk a gagné 124 milliards de dollars ! Or il est aujourd’hui un des plus proches conseillers de Donald Trump, qu’il a soutenu pendant toute sa campagne jusqu’à son entrée à la Maison Blanche. Sa proximité avec le nouveau président pourrait même propulser la valorisation de SpaceX, autre entreprise du milliardaire, à 350 milliards de dollars, gagnant ainsi 100 milliards en quelques jours, selon Bloomberg.

Mais les conflits d’intérêts pourraient bien être le talon d’Achille de la méga-star. Car le chef d’entreprise n’est pas seulement proche de Trump, il est désormais officiellement à la tête d’un nouveau ministère de l’Efficacité gouvernementale, avec Vivek Ramaswamy, ancien candidat républicain à la présidence. Son nouveau rôle au sein du gouvernement pourrait créer “une apparence de corruption et augmente les chances qu’une telle corruption se produise”. “Elle augmente le risque que la politique soit élaborée et mise en œuvre pour satisfaire les désirs de l’homme le plus riche du monde plutôt que ceux du public américain”, note dans Newsweek Donald Moynihan, professeur de politique publique à l’Université du Michigan. “Sa capacité à influencer les choix publics, en orientant notamment, les ressources vers ses projets technologiques (aérospatial, intelligence artificielle), pose la question du possible conflit d’intérêts”, ajoute dans une note la chercheuse à l’IRIS, Camille Boulenguer. Selon le New York Times, depuis plus de 10 ans, SpaceX et Tesla ont conclu des contrats d’au moins 15,4 milliards de dollars avec l’administration fédérale.

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