Publié le 22 décembre 2021
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Passer les fêtes sans s’étriper : non, personne ne va "interdire de manger de la viande"
Du faux gras à table et un rôti de seitan. Les pires craintes de l’oncle Albert sont en train de se réaliser, celle d’une France qui tourne le dos à la bonne chère. Ce qu’ignore l’oncle Albert c’est que personne ne va lui interdire de manger de la viande et que les végans n’ont pas pris le pouvoir. Profitez de Noël et des repas de famille pour discuter avec votre entourage et qui sait, peut-être les convaincre.

macniak / Istock
C’est là que tout a commencé. Là que les joues de l’oncle Albert ont commencé à virer au violet. Au moment où ma nièce de 15 ans a posé une boite de faux gras sur la table en disant "vous ne voulez pas essayer, pour remplacer le foie gras ?". Moment de crispation autour de la table. C’est reparti pour la ritournelle habituelle de l’oncle Albert à coups de "On ne peut plus rien manger" et "les végans nous auront".
Ce qu’ignore l’oncle Albert, qui se définit comme le "premier écolo de France" en tant que chasseur du dimanche, c’est que personne ne va lui interdire de consommer de la viande. Et que les végans n’ont pas pris le pouvoir. L’enjeu est plutôt de réduire sa consommation, pour pouvoir s’aligner sur l’Accord de Paris et une trajectoire de réchauffement climatique limitée à 1,5°C. Si on combine une baisse de la consommation de viande avec d’autres leviers comme une réduction des vols, ou l’interdiction des voitures thermiques d’ici 2024, l’idéal serait que chaque personne mange environ 25 kg de viande chaque année. Ce qui revient à environ un petit steak toutes les deux semaines. Une réduction importante puisque les Français consomment en moyenne 84,5 kg de viande par an.
Et il brandit la tradition
Le mieux est surtout d’éviter l’agneau et le bœuf, particulièrement émetteurs de gaz à effet de serre. La FAO, la branche "alimentation et agriculture" de l’ONU, calcule ainsi qu’un kilo de viande bovine émet 27 kg de gaz à effet de serre contre 6,9 pour le poulet par exemple. "J’ai rien compris", rétorque l’oncle Albert, "tu me parles de chiffres, de je te parle de gastronomie, de culture française, de tradition". C'est justement pour préserver l’agriculture française qu’il faut manger moins mais mieux. D’autant que l’argument "tradition" ne tient pas vraiment : dans les années 60, les Français mangeaient deux fois moins de viande qu’aujourd’hui, et les recettes traditionnelles tenaient le haut du tableau.
Consommer mieux, cela signifie préférer un boucher qui connaît les conditions d’élevage de son producteur local à une viande, plutôt qu'une viande à bas prix nourrie de soja qui participe à la déforestation en Amazonie. Une manière de prendre les devants puisque l’Union européenne pourrait bientôt adopter un texte contre la déforestation importée. À la mi-novembre, la Commission européenne a en effet proposé une nouvelle réglementation interdisant l’importation de produits dont l’exploitation provoque la destruction des forêts comme le café, le cacao mais aussi le soja et le bœuf. Un retour aux sources qui est aussi l’occasion de défendre "notre modèle agricole de haute qualité", a défendu le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie. Mais un argument de plus pour l’oncle Albert qui a sursauté au mot "interdiction".
Marina Fabre Soundron @fabre_marina