Publié le 22 octobre 2021
ENVIRONNEMENT
Stocamine : la justice annule l’enfouissement définitif des 42 000 tonnes de déchets toxiques
Confinement définitif, déstockage total ou partiel ? Depuis plus de vingt ans, ces questions agitent le village alsacien de Wittelsheim mais aussi les ministres de l'Environnement successifs. Au cœur du bras de fer qui oppose élus locaux et associations environnementales au gouvernement, il y a Stocamine, un site de stockage de déchets toxiques non radioactifs (mercure, amiante, arsenic ...). 42 000 tonnes de ces déchets, enfouis à 500 mètres sous terre, attendent le verdict final quant à leur traitement.

Le site de Stocamine contient 42 000 tonnes de déchets industriels dangereux non radioactifs.
C’est un nouveau rebondissement dans le feuilleton Stocamine, qui dure depuis plus de vingt ans. Dans la commune alsacienne de Wittelsheim (Haut-Rhin), 42 000 tonnes de déchets hautement toxiques mais non radioactifs (amiante, arsenic, mercure...) sont enfouis à 500 mètres sous terre dans une ancienne mine de potasse, sous la plus grande nappe phréatique d’Europe.
Au début de l’année, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, avait décidé leur confinement définitif, sans déstockage supplémentaire. Mais la semaine dernière, la Cour administrative d'appel de Nancy a annulé l'arrêté préfectoral. Les juges ont estimé que la société des Mines de potasse d'Alsace (MDPA), qui exploite Stocamine et dont l'État est l'unique actionnaire, ne justifie pas "de capacités financières la mettant à même de mener à bien l'exploitation illimitée" du site. Les premières coulées de béton, prévues début novembre, ont donc été suspendues.
"L'État veut passer en force"
La réaction du gouvernement n’a pas tardé. Il a annoncé son pourvoi en cassation devant le Conseil d'État. Dans un communiqué, le ministère de la Transition écologique estime que la décision de la cour "retarde un confinement qui ne peut plus attendre", notamment à cause de "l'affaissement des galeries du site (qui) rendra impossible toute intervention après la fin de la décennie". Et d'ajouter : "un déstockage complémentaire présenterait des risques significatifs pour les travailleurs", sans que "le bénéfice environnemental sur les nappes phréatiques ne soit démontré".
Sur place, élus locaux et associations de défense de l'environnement craignent une contamination de la nappe phréatique. Ils défendent un déstockage complémentaire des déchets plutôt qu'un confinement. "L'Etat veut passer en force", a commenté auprès de l'AFP Yann Flory, le porte-parole du collectif Destocamine. "Le gouvernement se fiche de l'avis des habitants et des élus. Il pourrit le dossier, il fait trainer, afin qu'on ne puisse bientôt plus retirer les déchets".
Ouvert en 1999 et censé devenir le premier site de stockage de déchets ultimes en France, Stocamine a été stoppé après un incendie dans l’une des galeries, en 2002. Les déchets de mercure, qui sont les plus polluants pour les eaux souterraines, ont été déstockés à plus de 95 % entre 2015 et 2017. En mars 2017, un arrêté préfectoral autorisait déjà le confinement définitif pour une durée illimitée, avant la publication d’un rapport qui prônait au contraire un déstockage total. Le bras de fer se poursuit donc et illustre la complexité de la gestion de nos déchets les plus dangereux.
Concepcion Alvarez @conce1