Publié le 18 janvier 2021
ENVIRONNEMENT
Stocamine : l’État se prononce pour le confinement définitif de déchets hautement toxiques à 500 mètres de profondeur
Début janvier, Barbara Pompili s'était rendu en Alsace sur le site de Stocamine, où sont enfouis 42 000 tonnes de déchets très toxiques à 500 mètres de profondeur. La ministre de la Transition écologique avait alors défendu l'idée d'un confinement définitif de ces déchets. Elle vient de confirmer cette décision ce lundi 18 janvier, malgré l'opposition d'élus locaux, de parlementaires et d'associations qui mettent en avant le principe de précaution.

@Mines de Potasse d'Alsace
C’est un feuilleton qui dure depuis près de vingt ans et auquel l’État vient enfin de mettre un terme. Dans la commune alsacienne de Wittelsheim (Haut-Rhin), 42 000 tonnes de déchets hautement toxiques, dits "ultimes", et enfouis à 500 mètres sous terre dans une ancienne mine de potasse, sous la plus grande nappe phréatique d’Europe, attendaient qu’on statue sur leur sort. C’est désormais chose faite. Ce lundi 18 janvier, Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique, a décidé "de lancer la réalisation du confinement du site sans déstockage complémentaire".
Cette décision a été prise à l’issue d’une nouvelle étude de faisabilité évaluant l’intérêt d’un déstockage partiel. Celle-ci a estimé que les risques étaient "élevés" pour les travailleurs exposés, sans que "le bénéfice environnemental sur les nappes phréatiques ne soit démontré". Mais sur place, élus locaux et associations sont vent debout contre un confinement total, qui va à l’encontre de la promesse de "réversibilité" faite au moment du lancement du site. Ils demandent un "déstockage immédiat et le plus total possible" afin de respecter le principe de précaution.
"Tous les experts prévoient que le site sera noyé"
Ouvert en 1999 et censé devenir le premier site de stockage de déchets ultimes en France, Stocamine n'a seulement fonctionné pendant près de quatre ans et a été stoppé après un incendie dans l’une des galeries, en 2002. Les déchets de mercure, qui sont les plus polluants pour les eaux souterraines, ont été déstockés à plus de 95 % entre 2015 et 2017. En mars 2017, un arrêté préfectoral autorisait déjà le confinement définitif pour une durée illimitée, avant un revirement de situation un an plus tard. Une étude de faisabilité pour un déstockage intégral des déchets est alors commandée et une mission parlementaire lancée.
Ses conclusions sont formelles : il faut s’orienter vers un déstockage total. "Je déplore cette décision qui piétine notre rapport parlementaire. Encore une fois, le cynisme a décidé" réagit ce 18 janvier Raphaël Schellenberger, député LR du Haut-Rhin et co-auteur du rapport. "Les 327 forages de reconnaissance et les 24 puits de mine présentent des fuites qui vont inexorablement noyer les anciennes mines. Tous les experts prévoient que le site sera noyé", alerte la Collectivité européenne d’Alsace, dans une motion adoptée le 15 janvier.
L’Etat vient d’annoncer sa décision pour #Stocamine, retenant le scénario d’un #confinement définitif sans déstockage supplémentaire. Une fois de plus, #EnMarche décide de s'asseoir sur le travail parlementaire. C’est une nouvelle victoire de l’administration sur le politique. pic.twitter.com/Uv1eVYQXLw
— Raphaël Schellenberger (@RSCactu) January 18, 2021
Une enveloppe de 50 millions d'euros pour protéger la nappe
"Il reste quelques produits dangereux mais la plupart des sacs contiennent des produits qui ne sont pas solubles, donc pas dangereux pour la nappe phréatique", a estimé la ministre, rappelant également qu’"il faut prendre une décision face à l'affaissement des galeries". En parallèle, elle a débloqué une enveloppe de 50 millions d’euros sous pilotage de l’Ademe pour permettre un plan de protection de la nappe d’Alsace sur les cinq prochaines années. Plusieurs anciens sites industriels situés au-dessus de la nappe seront ainsi dépollués.
Depuis 20 ans, l'avenir des déchets industriels stockés à Stocamine pose question. De nombreuses études techniques ont été menées et je me suis récemment rendue sur place. Il n'y a pas de solution simple, mais il faut prendre une décision face à l'affaissement des galeries.
— Barbara Pompili (@barbarapompili) January 18, 2021
Fin 2018, le BRGM avait évalué qu’en cas de défaillance du confinement, les risques sur la nappe phréatique étaient "limités" et n’apparaîtraient que dans "600 ans à 1 000 ans". Il prônait comme solution alternative le déstockage partiel du site pour les déchets solubles. Ce type de déchets représent 25 % des colis enfouis sous terre. Toutefois "cette solution présenterait aujourd’hui des risques plus importants et plus graves pour les opérateurs et l'environnement que la poursuite du confinement" avait alerté l’organisme.
Concepcion Alvarez @conce1