Publié le 15 octobre 2019
ENVIRONNEMENT
Quinze ans après la fermeture de l'usine Seveso MetalEurop, l’État attaqué pour préjudice écologique
Quelques jours après l'incendie de l'usine Lubrizol de Rouen, la polémique autour des sites Seveso se poursuit. Dans le Pas-de-Calais, la communauté d'agglomération d'Hénin-Carvin a déposé un recours contre l'État pour préjudice écologique après la fermeture de l'usine Seveso MetalEurop. Une première en France.

@CCO/Nicod
La communauté d'agglomération d'Hénin-Carvin (CAHC), dans le Pas-de-Calais, va poursuivre l’État en justice "pour préjudice écologique". Une première en France, selon l’avocat des requérants, qui s’appuie sur la loi Biodiversité, entrée en vigueur en 2016. Dans le viseur des communes, la pollution laissée par la fonderie Metaleurop Nord, liquidée en 2003.
Implantée en 1894 à Noyelles-Godault, dans le bassin minier, l'usine métallurgique classée Seveso a produit pendant plus d’un siècle des centaines de milliers de tonnes de plomb, de zinc et d'acide sulfurique par an, faisant de ce site l’un des plus pollués de France. Sur 600 hectares autour, les sols demeurent fortement contaminés notamment en plomb et cadmium.
L'État complice
"On est dans le lieu le plus symbolique de la gestion industrielle des risques. On retrouve la même problématique que sur l'amiante", assure à l'AFP Me David Deharbe, avocat de l'agglomération. "La pollution résulte d'une complicité de l'Etat, qui a mal contrôlé l'exploitant. On a la preuve que les seuils quantitatifs autorisant Metaleurop à polluer étaient délirants", ajoute-t-il.
La zone impactée concerne cinq communes et 24 000 personnes. Elle est encadrée depuis 1999 par un projet d'intérêt général (PIG) qui restreint l'usage des sols. Toute activité agricole demeure interdite et les autorités déconseillent de manger les légumes-racines des potagers en autoconsommation. Avant toute construction, il faut décaisser les sols et évacuer la terre polluée.
Saturnisme chez les enfants
Des particuliers, réunis au sein de l’association Pour l’intérêt général des Évinois (Pige) avaient déjà eux-mêmes déclenché une action contre l’État pour "mise en danger de la vie d'autrui" et pour "non-assistance à personne en danger" en raison de nombreux cas de saturnisme autour de l'usine, chez des enfants notamment. "L'État nous laisse vivre sur un terrain pollué", s'insurge Bruno Adolphi, habitant d’Evin-Malmaison et fondateur de l’association. "C'est une certaine injustice".
L'Agence régionale de santé (ARS) se veut néanmoins rassurante. "Le fait d'habiter près de ce site ne majore pas le risque de sur-imprégnation cadmium par rapport à la population générale du Nord-Pas-de-Calais", affirme Carole Berthelot, directrice de la sécurité sanitaire et de la santé environnementale. Selon une étude de l'observatoire régional de la santé (ORS) de 2002, 13% des enfants dépistés dans les communes aux abords de l'usine étaient atteints de saturnisme.
Concepcion Alvarez avec AFP