Publié le 20 août 2020
ENVIRONNEMENT
[Les monstres des abysses] Le volume sonore des océans devient insupportable pour les mammifères marins
L’humanité n’épargne rien aux océans. Il y a les pollutions dues aux hydrocarbures, au plastique, aux métaux… et aussi à cause du son. Alors que 90 % du commerce mondial passe par les mers, la gigantesque flotte de porte-conteneurs fait des milieux sous-marins une véritable cacophonie. Toute la semaine, Novethic sillonne les abysses à la recherche de ces monstres créés par les humains.

@Scubaluna
Le monde du silence, si cher à Jacques Cousteau, n’est qu’un lointain souvenir. Selon les données de l’Organisation Maritime Internationale (OMI), depuis 60 ans, le volume sonore dans le Pacifique Nord a doublé tous les dix ans. C’est l’Homme qui est à l’origine de cette hausse du volume. Parmi les responsables, se trouvent les forages pétroliers, les installations d’éoliennes offshores, le tourisme. Mais une activité à elle seule génère plus de 50 % de ce bruit : le commerce international.
90 % du transport commercial international passe par les mers et est assuré par une flotte de plus de 90 000 navires. Or ceux-ci sont bruyants, très bruyants. Le son provient de trois sources : le moteur et les machineries, les hélices et le phénomène de cavitation (les bulles qui apparaissent dans l’eau en raison des dépressions dues au mouvement des pales). Le volume est d’autant plus accentué que les bateaux sont peu ou mal entretenus.
Le problème aggravant est que l’eau conduit extrêmement bien le son. Il y voyage quatre fois et demie plus rapidement que dans l’air, il s’atténue très peu et l’interface eau/air agit comme un miroir réfléchissant qui redirige les vibrations vers le fond de l’eau. Selon des mesures de l’Ocean Networks Canada, de Vancouver, ces sons issus du trafic maritime sont audibles jusqu’à 60 kilomètres.
Effet du confinement
Les premières victimes sont les mammifères marins (baleines, dauphins, épaulards…) qui utilisent l’écholocalisation pour chasser, communiquer, naviguer, trouver des partenaires sexuels. Ils émettent sur des plages de fréquences que les sons anthropiques viennent largement perturber. Selon l’OMI, dans certaines zones, les navires interfèrent avec 90 % des plages de communication.
Les mammifères ont d’ailleurs connu un certain répit lors du confinement au premier semestre 2020 lors du confinement de plus de trois milliards d’humains. La baisse d’activité qui en a résulté a permis aux scientifiques d’enregistrer une baisse de 4 à 5 décibels dans les milieux sous-marins. Pour mémoire, l’échelle des décibels indique un doublement du volume sonore toutes les trois unités. Cela a permis aux cétacés de communiquer sans avoir à "hurler", expliquent les scientifiques.
Ludovic Dupin @LudovicDupin