Publié le 02 juin 2021
ENVIRONNEMENT
Joe Biden soutient de nouveaux forages pétroliers en Alaska mais interdit temporairement ceux prévus dans la réserve naturelle
Premier coup dur pour les ambitions environnementales de Joe Biden. Le 26 mai, le Président américain a annoncé son soutien à un gigantesque projet pétrolier en Arctique, après avoir suspendu les permis accordés par Donald Trump avant son départ de la Maison-Blanche. Les associations environnementales accusent l'administration d'avoir mal évalué l'impact des forages sur la biodiversité, même si celui-ci essaie d'éteindre l'incendie.

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[Mis à jour le 2 juin 2021] Si l’Alaska est connu pour abriter les derniers espaces sauvages de la planète, elle l’est aussi pour ses nombreux gisements d’or noir. Entre l'un et l'autre, l’ancien président Donald Trump avait tranché. Avant la fin de son mandat, il avait multiplié l'octroi de concessions d'exploitations pétrolières et gazières sur les rives de l’océan Arctique. En octobre 2020, le pétrolier ConocoPhillips avait ainsi obtenu un permis pour lancer des forages au cœur de la réserve nationale pétrolière de l’Alaska. Un projet colossal, qui permettrait la production de 100 000 barils par jour dès 2024, et pendant 30 ans.
Voulant trancher avec les politiques climatiques de son prédécesseur, la mise en place d'un moratoire sur les permis de forage a été l’une des premières mesures décrétées en janvier par le nouveau président Joe Biden, dans l’attente des résultats d’une étude d’impact. Avec la nomination de Deb Haaland, opposée à l’octroi des concessions lorsqu’elle était parlementaire, au poste de secrétaire de l’Intérieur, la poursuite du projet semblait compromise. C’était sans compter l’intervention de deux sénateurs républicains de l’Alaska, Dan Sullivan et Linda Murkowski, venus défendre leurs intérêts à la Maison-Blanche le 24 mai. Deux jours plus tard, Joe Biden publiait un document affichant son soutien au projet pétrolier. En revanche, il a déclaré le 1er juin interdire "temporairement" les forages dans le refuge national de la faune arctique, situé à l'Est et la plus grande zone naturelle des États-unis, dans l'attente d'une "analyse complète".
Incompréhension et déception
Les critiques ont été cinglantes de la part des associations environnementales et des peuples autochtones, qui estiment que le gouvernement a mal évalué l’impact des forages sur la biodiversité, notamment sur les migrations des caribous, les ours polaires, et sur les peuples autochtones. L’association Alaska Wilderness League s'est déclarée "extrêmement déçue".
D’autant plus que la viabilité du projet elle-même est questionnée. Alors que l’Arctique se réchauffe beaucoup plus vite que le reste de la planète, le pétrolier envisage d’avoir recours à des refroidisseurs pour éviter la fonte de la glace qui menace la stabilité des infrastructures, dont 900 kilomètres de routes et 500 kilomètres d'oléoducs.
L’emploi avant tout
Mais Joe Biden l’a plusieurs fois martelé : la lutte contre le réchauffement climatique est avant tout une opportunité pour créer des emplois, et le projet de ConocoPhillips, bapstisé "Willow" permettrait d'en créer 2 000, selon le sénateur Dan Sullivan. De quoi reléguer l'environnement au second plan. Le ton de l’administration avait déjà changé mi-mars. Après une réunion avec les représentants de l’industrie pétrolière et gazière, la conseillère nationale pour le climat Gina McCarthy, prônait en faveur de la coopération.
"L'administration ne lutte pas contre le secteur pétrolier et gazier, mais se bat pour créer des emplois syndiqués "soulignait un communiqué. En mai, le pétrolier avait annoncé qu’il ne prendrait pas de décision tant qu'il y aurait encore des incertitudes juridiques persisteraient. L’issu de l’affaire devrait être connu avant la fin d'année.
Pauline Fricot, @PaulineFricot