Publié le 31 octobre 2023
ENVIRONNEMENT
Bombes climatiques : découvrez les entreprises et les banques qui se cachent derrière les projets les plus climaticides au monde
C'est une mine d'informations. La plateforme CarbonBombs, mise en ligne ce mardi 31 octobre, cartographie l'ensemble des 425 bombes climatiques présentes dans le monde, ces sites d'extraction de charbon, gaz et pétrole qui peuvent émettre chacun au moins un milliard de tonnes de CO2 et mettre en péril nos engagements climatiques. Elle permet aussi d'identifier les entreprises et les banques associées à ces projets climaticides.

capture d'écran
Où se trouvent les bombes climatiques ? Quelles entreprises opèrent ou participent à ces projets ? Et quelles banques les financent ? C’est à ces trois questions que répond la nouvelle plateforme en opensource CarbonBombs, lancée ce mardi 31 octobre par deux organisations françaises, l’ONG Data for Good et le collectif Éclaircies. Le concept de "bombe climatique" avait été révélé en 2022 par Kjell Khüne. Le chercheur allemand avait alors identifié 425 sites d'extraction d’énergies fossiles à travers le monde, capables d’émettre chacun plus d’un milliard de tonnes de CO2 (une gigatonne).
Au total, si les réserves de tous ces projets étaient bel et bien épuisées 1 180 gigatonnes de CO2 seraient ainsi émises. Or, selon une nouvelle étude parue le 30 octobre, dans Nature Climate Change, le budget carbone pour rester dans un scénario 1,5°C – c’est-à-dire ce qu’on peut encore émettre - est de 250 gigatonnes de CO2… soit presque cinq fois moins !
TotalEnergies, 2e major en termes de bombes climatiques
Trois pays concentrent à eux seuls la moitié de ces projets les plus climaticides au monde. La Chine arrive en tête avec 141 bombes climatiques, suivie par la Russie avec 40 bombes climatiques et les États-Unis avec 28 bombes climatiques. Bien que la moitié des bombes climatiques concernent des mines de charbon, la plus grosse bombe climatique est la réserve de pétrole et gaz de schiste du Permian Delaware Tight aux États-Unis. Son potentiel d’émissions est d'environ 28 gigatonnes de CO2. Des majors comme Exxon ou Chevron y sont associées.
Côté entreprise, China Energy remporte d'ailleurs, loin devant, la palme du groupe émettant le plus de bombes climatiques. Mais sur la deuxième place du malheureux podium se trouve la major TotalEnergies qui est associée à 17 bombes climatiques émettant potentiellement 12 gigatonnes de CO2. Des chiffres qui donnent le tournis et qui sont sans doute sous-estimés, puisqu'ils s'appuient sur des données de 2020. La semaine dernière, une enquête de Greenpeace, se basant sur des données plus récentes, révélait ainsi la présence de la major française dans 33 bombes climatiques, avec un potentiel impact estimé à 93 milliards de tonnes de CO2 équivalent. C’est plus de deux fois les émissions mondiales de gaz à effet de serre.
BNPParibas, 5e banque mondiale impliquée dans ces bombes climatiques
Enfin, la plateforme s’intéresse aussi aux banques qui financent directement ces projets ou les entreprises liées à ces bombes climatiques. Dans le Top 10, on retrouve encore deux Françaises, BNP Paribas (5e rang) et Crédit agricole (7e rang), qui financent chacune une trentaine d’entreprises liées aux bombes climatiques telles que BP, TotalEnergies, Eni, Shell, Saudi Aramco, ou encore Petrobras. Société générale et BPCE apparaissent également dans le top 50. "Quand on parle de projets fossiles, on s'arrête souvent aux majors pétro-gazières, c'est pourquoi nous avons voulu montrer le rôle fondamental du financement", explique à Novethic Lou Welgyn, co-présidente de Data for Good et co-fondatrice d’Éclaircies.
À un mois de la COP 28, cette plateforme vise la démocratisation de ces informations afin de souligner l’importance d’une sortie rapide des énergies fossiles coordonnées à l’échelle internationale, enjeu clé des négociations. "C’est une course contre la montre pour stopper le déploiement de nouveaux projets d’extraction fossile, et fermer graduellement ceux actuellement en opération", appellent les organisatrices à l’origine du projet. Quant à Adnoc, major pétrolière dirigée par le président de la COP28, elle est elle-même impliquée dans trois bombes climatiques.