Maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 2°C, soit l’objectif de l’Accord de Paris, est désormais impossible. C’est la conclusion alarmante d’une nouvelle étude publiée mardi 4 février, sous la direction de l’ancien climatologue de la Nasa, James Hansen. Dès 1988, cet éminent scientifique fut l’un des premiers à alerter sur le changement climatique, affirmant devant le Sénat américain qu’il était “sûr à 99% que le climat était entré dans une période de réchauffement”.
Cassandre ou visionnaire, James Hansen annonce, près de quarante ans plus tard, que l’objectif de 2°C est désormais “mort”. Lors d’une conférence de presse, il a confirmé que l’un des scénarios ambitieux du GIEC – qui tablait sur une diminution nette des émissions de gaz à effet de serre permettant de maintenir le réchauffement sous les 2°C – est “aujourd’hui impossible”.
En cause ? La consommation énergétique mondiale, qui “augmente et continuera d’augmenter”, avec une “majeure partie de l’énergie provenant encore des combustibles fossiles”, principaux émetteurs de gaz à effet de serre. À cela s’ajoute, selon cette équipe de chercheurs, “un manque de réalisme dans l’évolution du climat”.
De très lourdes répercussions
Les chercheurs estiment que certains phénomènes sous-jacents au changement climatique ont été sous-estimés, notamment l’impact de la réduction des émissions de soufre imposée aux navires, qui participaient à refroidir l’atmosphère en réfléchissant la lumière du soleil vers l’espace. Pour l’équipe de James Hansen, “ne pas être réaliste dans l’évaluation du climat et ne pas dénoncer l’inefficacité des politiques actuelles pour endiguer le réchauffement climatique n’aide pas les jeunes”. Mais la réalité est peu réjouissante.
Ces chercheurs estiment que la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique (AMOC), un système de courants marins jouant un rôle majeur dans la régulation du climat, devrait cesser “au cours des 20 à 30 prochaines années”, notamment en raison de la fonte des glaces. Cela entraînera “des problèmes majeurs, notamment une élévation du niveau de la mer de plusieurs mètres”, préviennent-ils, évoquant même “un point de non-retour”. Concernant les températures, elles devraient rester supérieures à 1,5°C dans les années à venir, avant de grimper à 2°C d’ici 2045.
Vers une Terre toujours plus invivable
Hasard du calendrier, une autre étude publiée le même jour dans la revue scientifique Nature Reviews Earth and Environment indique qu’avec un réchauffement de +2°C, trois fois plus de régions à la surface de la planète seront touchées par des températures insoutenables. Entre 1994 et 2023, les tolérances thermiques (la combinaison de la température et de l’humidité) au-delà desquelles le corps humain ne peut pas résister ont été dépassées sur environ 2% de la surface terrestre mondiale pour les adultes en bonne santé (de 18 à 60 ans). Or, sur une planète à +2°C, cette “surface surchauffée” triple pour atteindre 6% de la Terre, soit une zone presque aussi grande que les États-Unis.
À noter que depuis les années 2000, plus de 260 000 décès liés à la chaleur ont été recensés, dont environ 72 000 en Europe en 2003, 62 000 en 2022 et 56 000 lors de la canicule russe de 2010. “Il est essentiel d’anticiper l’ampleur des futures chaleurs extrêmes et leurs conséquences les plus graves pour comprendre les coûts de l’échec des mesures d’atténuation du changement climatique”, alerte le principal auteur de cette étude, Tom Matthews, ajoutant qu’ “il est également crucial de cibler les efforts d’adaptation sur les communautés qui en ont le plus besoin“.