Est-ce le scandale de trop ? Ce jeudi 25 avril, Nestlé a dévissé en Bourse à -3,3%, son action étant en chute de -22% sur un an. La veille, le géant de l’alimentaire avait été contraint par arrêté préfectoral de détruire deux millions de bouteilles de sa marque Perrier. En cause ? La présence de bactéries d’origine fécale dans l’un des puits exploités sur son site de Vergèze, dans le Gard.
Nestlé Waters évoque une “déviation microbiologique ponctuelle” apparue à la suite “des très fortes pluies liées à un événement de type méditerranéen récent dans le Gard” dans le week-end du 10 mars. Mais selon l’arrêté du préfet du Gard, consulté par l’AFP, le puits où Nestlé ne peut plus pomper jusqu’à nouvel ordre avait “déjà fait l’objet de contaminations bactériologiques antérieures à la suite d’épisodes pluvieux de type méditerranéen”.
Des contaminations “régulières”
Début avril, Le Monde et Franceinfo révélaient que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) avait remis au ministère de la santé, mi-octobre 2023, une note estimant que la qualité sanitaire des eaux du groupe Nestlé (Perrier, Contrex, Vittel, Hépar…) n’était pas garantie. Et ce, tant sur les sites des Vosges (Vittel, Contrex, Hépar) que du Gard (Perrier).
Concernant le site de Vergèze, un courrier de l’agence régionale de santé Occitanie de juin 2023, consulté par l’AFP, relevait aussi que l’exploitant était confronté à une “contamination bactériologique régulière (…) notamment après des épisodes pluvieux, sur au moins cinq des sept forages autorisés“. Ces bactéries signalent une contamination par des matières fécales, qui ont pénétré jusque dans la nappe.
Ces nouvelles révélations vont sans aucun doute encore fragiliser le groupe qui avait déjà dû admettre publiquement en début d’année avoir eu recours en France et en Suisse à des traitements interdits sur les eaux minérales (désinfection par lampe UV, filtration sur charbon actif), pour garantir une consommation sans risque.
Des notes moyennes dans les classements ESG
Une dérive prévisible ? Nestlé ne figure en tout cas pas parmi les entreprises les mieux notées, notamment sur la gestion de la ressource en eau. Ainsi, le classement du CDP sur cette thématique, qui fait référence dans le secteur, attribue la note moyenne de B au géant suisse pour l’année 2023, alors que ses deux principaux concurrents sur les eaux en bouteille, Danone et Coca-Cola obtiennent la note A, traduisant leur position de leader.
Plus globalement, si l’on prend par exemple le palmarès RSE 2023 du Point, qui classe les entreprises françaises, tous secteurs d’activité confondus, sur les 3 piliers de la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) – l’environnement, le social et la gouvernance – Nestlé arrive à la 169e place, loin derrière Danone classée 78e. Morningstar Sustainanalytics lui attribue en outre un risque de controverse de 23,7 considéré comme moyen, contre un risque faible pour Danone (17,8).
Autre fait marquant, en 2021, Nestlé avait été sorti de l’indice de durabilité Dow Jones Sustainability World Index (DJSI World), établi par une filiale de S&P Global. Cet indice mesure les performances des entreprises sélectionnées selon des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), à destination des investisseurs, actionnaires mais aussi ONG. En 2023, le géant de l’agroalimentaire suisse n’apparaissait pas non plus au sein de l’indice européen.
Déjà mis sous pression par ses actionnaires sur les aliments sains lors de sa dernière AG, le groupe qui a vu ses ventes chuter au premier trimestre, pourrait bien être davantage chahuté face aux nombreuses révélations qui voient le jour. Quelques semaines avant l’annonce sur la destruction des bouteilles Perrier, une étude de l’ONG suisse Public eye avait montré que les produits pour bébé Nestlé, vendus dans les pays émergents, contenaient plus de sucre que les mêmes vendus dans les pays occidentaux.