Publié le 24 juin 2020

SOCIAL

André, Naf Naf, Camaïeu… Le Covid-19 provoque une hécatombe dans le secteur de l'habillement

Une à une, les enseignes de l'habillement tombent. Après André, mis en redressement judiciaire, la Halle, Camaïeu ou encore Naf Naf... c'est au tour de Celio d'être placé en procédure de sauvegarde. Si l'impact du Covid-19 est particulièrement violent pour le secteur, c'est qu'il était déjà en difficulté avant la crise sanitaire. Pour perdurer, les enseignes vont donc devoir changer de cap. Et c'est sur la digitalisation et la mode responsable qu'elles sont attendues pour être plus résilientes.

Redressement judiciaire la halle habillement Covid
Le Covid-19 a porté le coup de grâce à ces enseignes déjà fragiles avant la crise sanitaire.
ALAIN PITTON / NURPHOTO / NURPHOTO VIA AFP

C'est André qui a ouvert le triste bal. La société de chaussures, centenaire, a été placée en redressement judiciaire dès le 1er avril. Depuis cette annonce, les enseignes Naf Naf, la Halle ou encore Camaïeu ont pris le même chemin. Le 22 juin c'était au tour de Célio, spécialisé dans le prêt-à-porter masculin, d'annoncer une procédure de sauvegarde. Il faut dire qu’après les Gilets jaunes et les grèves… il était difficile pour ce secteur de résister aux chocs liés à la crise sanitaire. Ainsi, selon l’Institut français de la mode (IFM), "pour les cinq premiers mois de l’année 2020, les chiffres d’affaires des distributeurs (hors vente à distance) ont accusé un retrait de 29,6 % par rapport à la même période de 2019".

Si le Covid-19 a porté le coup de grâce à ces enseignes, le secteur se porte mal depuis longtemps déjà. Depuis 2008, le marché a perdu 15 % de sa valeur à cause, notamment, d’une baisse de la consommation de vêtements mais aussi du changement de comportements des consommateurs qui se tournent de plus en plus vers l’occasion et le seconde main. "On a une conjonction de plusieurs phénomènes", explique Thomas Delattre, professeur à l'IFM. "Cela fait cinq à dix ans que ces enseignes de moyenne gamme rencontrent des difficultés. Sur ce segment, le marché est saturé, il y a énormément de concurrence", ajoute-t-il. 

Un secteur plus lourd que "l'aéronautique et l'automobile"

Surtout, face à la baisse de la consommation du textile, à la concurrence de mastodontes comme Zara et H&M, les enseignes ont eu tendance à ouvrir des magasins pour attirer la clientèle et compenser les pertes. Un modèle insoutenable qu’elle paye aujourd’hui. Malgré cette difficile situation, le secteur n’a pas obtenu de prêt garanti par l’État (PFE) qui aurait pu l’aider à se relever. 

"Bercy a fait le choix de l’industrie, en soutenant Renault, Air France, l’aéronautique. Pas celui du commerce. Cette absence de soutien nous achève", dénonce dans Le Monde Yohann Petiot, directeur général de la fédération Alliance du commerce. Pourtant, le secteur pèse lourd en France. Selon la Direction générale des entreprises, le secteur de la mode et du luxe, en y intégrant les produits de beauté et de maroquinerie, représente plus que "l’aéronautique et la construction automobile réunis" avec un chiffre d’affaires atteignant les 150 milliards d’euros.

"La mode responsable est clairement une opportunité"

Pour perdurer, les enseignes vont donc devoir changer de cap. Car la partie n’est pas finie. La justice peut ordonner une période d’observation pouvant aller jusqu'à 18 mois. C’est le cas notamment de la Halle pour laquelle le tribunal de commerce de Paris a accepté un sursis de six mois permettant ainsi l’étalement du règlement de certaines créances et la suspension du paiement des loyers. "Dans les mois à venir, on va pouvoir observer l’agilité de ces enseignes", note Thomas Delattre. Deux éléments seront scrutés à la loupe : la digitalisation, pour celles qui n’ont pas encore pris le virage du numérique, et l’éco-responsabilité.

"La mode responsable est clairement une opportunité. Comme pour le digital, certaines sociétés s’en sont sorties sans, mais celles qui ont pris tôt cet engagement s’en sortent mieux", résume l’expert. Et de fait, pendant la crise du Covid-19, les marques de mode qui avaient misé avant le confinement sur des chaînes d’approvisionnement plus courtes, plus résistantes et plus transparentes ont fait preuve de résilience. Elles peuvent "mieux contrôler les situations inattendues", note le journal de mode WWD. 

Marina Fabre, @fabre_marina


© 2023 Novethic - Tous droits réservés

‹‹ Retour à la liste des articles

SOCIAL

Consommation

Produits verts, bio, issus du commerce équitable ou made in France….les marques multiplient les produits vendus comme écologiques, durables et responsables et les consommateurs prennent conscience de l’impact de leur choix sur l’environnement. Ces nouvelles pratiques de consommation doivent reposer sur des labels crédibles.

Desinfluence influenceurs tik tok reseaux sociaux

Désinfluence : sur les réseaux sociaux, les influenceurs tournent le dos à la surconsommation

Depuis quelques semaines, le ton a changé sur TikTok. Cosmétiques, fast-fashion, accessoires… Fini les codes promo et les partenariats, les influenceurs présentent aujourd’hui à leur communauté les produits à ne pas acheter. Une tendance qui prend de l’ampleur mais qui ne relève pas toujours de la...

Publicite istock

Travailler plus pour consommer plus : les effets pervers de la publicité

Un rapport de l’association Communication et démocratie et de l’Institut Veblen, s’appuyant sur une étude universitaire, montre les impacts économiques très concrets des dépenses de publicité en France. Celles-ci ont conduit à une hausse de la consommation mais aussi à une hausse des heures...

Voitures suv istock

"La baisse des ventes de véhicules profite aux constructeurs automobiles", selon Aurélien Bigo

La baisse des ventes automobiles n'est une bonne nouvelle ni pour le climat, ni pour les particuliers. C'est ce qu'explique à Novethic le chercheur sur la transition énergétique des transports, Aurélien Bigo. Il décrypte la stratégie des constructeurs : vendre moins mais plus chers des véhicules...

Ville verte sobriete frugalite pietons velos verdure transition istock Michael Wels

Inscription dans la loi, partage de l'effort, temps de travail : plus de 5 000 citoyens font des propositions en faveur de la sobriété

Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a adopté mercredi 11 janvier un avis sur la sobriété afin de favoriser son évolution dans la société et dans nos modes de vie. Signe que le sujet, encore tabou il y a un an, se démocratise. Parmi la vingtaine de préconisations, il y a la...