Publié le 30 août 2023
SOCIAL
Loud quitting : la génération Z démissionne en direct sur TikTok
Après la grande démission et le conscious quitting, les salariés s’emparent d’une nouvelle stratégie pour bousculer le monde du travail : le loud quitting. Le phénomène, qui consiste à exposer ouvertement son insatisfaction face à ses conditions de travail, concernerait un travailleur sur cinq dans le monde. Certains salariés n'hésitent plus à démissionner en direct sur les réseaux sociaux.

Capture écran
Dans le sillage de la grande démission, les salariés font de plus en plus valoir leurs droits et leurs attentes au travers de phénomènes médiatisés sur les réseaux sociaux, comme TikTok. Ces derniers mois ont ainsi été marqués par l’émergence du quiet quitting, la démission silencieuse, puis du conscious quitting, la démission consciente. D’un côté, les travailleurs avouent limiter exclusivement leur travail au cadre de leurs missions en opposition à la hustle culture, concept associé à l’imaginaire du succès qui encourage la surperformance et l’hyperproductivité. De l’autre, ils revendiquent le fait de quitter leur société car elle ne correspond pas à leurs valeurs.
Alors que la pandémie a rebattu les cartes du monde du travail, les employés insatisfaits de leurs conditions s’emparent aujourd’hui d’une nouvelle stratégie : le loud quitting, soit la démission bruyante. Le principe : partager ouvertement son mécontentement, voire sa volonté de quitter son emploi auprès de ses collègues et de ses supérieurs hiérarchiques pour obtenir une amélioration de ses conditions de travail et impulser un changement global au sein de l’entreprise.
Désengagement actif
D’après un rapport publié en juin 2023 par Gallup, société de conseil qui mesure et suit l'engagement des travailleurs au niveau mondial, près d’un salarié sur cinq s’inscrirait dans cette dynamique parmi les 160 000 interrogés. Déclenché en partie par le retour au bureau, bouleversant après des mois de travail à distance l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle, le phénomène est caractérisé par un "désengagement actif" des employés, expliquent les auteurs.
Les sujets de mécontentements peuvent ainsi porter sur l’organisation de l’entreprise, des pratiques de management qualifiées de "toxiques", la sous-valorisation du salaire ou encore la dégradation de la santé mentale des salariés. Selon Gallup, 56% des employés pratiquant le loud quitting se sentent en effet "très stressés", contre seulement 30% des travailleurs dits "engagés". "La cause de ces loud quitting (…) réside principalement dans la manière dont les gens sont gérés", souligne auprès du média Insider Jim Harter, l’un des auteurs de l’étude, qui estime à 70% la responsabilité des managers dans la variation de l’engagement des équipes.
8 000 milliards de dollars
Une situation qui mène à une recherche d’emploi active pour 61% des salariés désengagés, prêts à "accepter un autre poste assez rapidement s'il se libère." Résultat, les entreprises doivent faire face à une baisse de la productivité, un turn-over plus important et une perte de talents. Le désengagement des collaborateurs représenterait alors un potentiel de productivité inexploité allant jusqu’à 8 000 milliards de dollars au niveau mondial avance Gallup.
Autre conséquence, les loud quitters peuvent également nuire à l’image de marque des sociétés. "Ils sont détachés de l'organisation, mais aussi émotionnellement opposés à l'organisation, et ils le feront savoir", ajoute Jim Harter. Les salariés prennent pour cela la parole sur les réseaux sociaux, en particulier TikTok où le phénomène rassemble plus de 10 millions de vues autour du hashtag #loudquitting.
Sur la plateforme, des internautes témoignent de leurs frustrations dans des dizaines de vidéos, allant parfois jusqu’à filmer en direct leur démission. Un véritable mouvement générationnel s’y exprime, impulsé par la Génération Z. "Je préfère cette version à celle du quiet quitting. Beaucoup plus directe", commente une utilisatrice sous l’un des clips visionné plus de 10 millions de fois. "Ces boomers ne comprennent pas assez vite avec la version ‘quiet’", conclu-t-elle.