“La situation ne s’améliore pas”, indique à Novethic Christophe Nguyen, président d’Empreinte Humaine. À qui la faute ? Au Covid-19 en partie, avec un tiers des salariés interrogés estimant que la crise sanitaire impacte encore aujourd’hui leur niveau de fatigue. Mais surtout au travail, pour 74% des travailleurs. Indice phare de ce mal-être : par rapport à la période pré-Covid, le risque de burn-out explose. Près d’un salarié sur quatre, soit 2 millions de personnes affirment être en risque de burn-out. Une tendance qui touche en particulier les femmes (à 49%), les jeunes (55%) et les managers (44%).
Organisation du travail, un “terreau du burn-out”
Or, “c’est bien l’organisation du travail qui fait le terreau du burn-out : la valorisation du présentéisme, la surveillance accrue des travailleurs par les technologies du numérique, la perte d’autonomie face à des procédures de plus en plus strictes… Tout concourt à mettre le salarié sous pression, à faire éclater les collectifs, à alimenter les tensions interpersonnelles”, précise la psychologue Marie Pezé sur le site de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS).
Les entreprises ont-elles conscience de cette crise de la santé mentale au travail qui se répand chez leurs salariés ? Pas vraiment selon Christophe Nguyen, “la santé mentale reste leur angle mort”, précise-t-il. “Les entreprises ont une approche légaliste du sujet. Elles font ce que la loi leur impose. Or il faut aller plus loin”. Dans un contexte inflationniste, après les confinements imposés par la crise sanitaire du Covid-19, l’enjeu pour les entreprises est surtout de rattraper leur retard sur leurs objectifs. Quitte à passer à côté des attentes de leurs salariés. Or ces derniers sont en quête de sens.
La réforme des retraites en question
En pleine réforme des retraites, le rapport au travail des Français pose donc question. D’autant que selon Empreinte humaine, 6 salariés sur 10 pensent que leur état de santé psychologique et physique ne leur permettra pas de travailler jusqu’à la retraite. 9 sur 10 estiment que les conditions de travail doivent être améliorées. “À l’heure où on parle de recul de l’âge de départ en retraite, on ne parle pas du travail pour le rendre plus durable”, défend Christophe Nguyen.
Et les efforts attendus sont grands pour les entreprises. La sociologue Dominique Meda rappelait ainsi le mois dernier à Novethic le classement particulièrement bas de la France sur les conditions de travail. “La dernière vague de l’enquête d’Eurofound, réalisée en 2021 auprès de plus de 70 000 Européens de 36 pays, montre que les contraintes physiques sont plus fortes en France qu’ailleurs”, pointait-elle. “Pour plus de 43% des Français, leur emploi implique toujours, souvent, ou parfois de déplacer des charges lourdes (contre moins de 30% aux Pays-Bas et 35% en Europe).” D’où la présence, dans les manifestations contre la réforme des retraites des métiers pénibles comme les éboueurs, les caissières ou les infirmières.
Marina Fabre Soundron