Publié le 20 octobre 2022
POLITIQUE
La démission de Liz Truss, nouvelle mort du Royaume-Uni d’Élisabeth II et de Margaret Thatcher ?
Le mandat de la Première ministre britannique n’aura survécu qu’un peu plus d’un mois à la reine d’Angleterre. Liz Truss est encore en vie mais sa carrière politique est morte, 45 jours après l’enterrement en grande pompe d’Élisabeth II qui traînait dans son cortège les derniers restes du 20e siècle, du modèle économique prôné par Margaret Thatcher à la grandeur britannique que le Brexit devait restaurer. Retour sur la chute de Liz Truss, emblème du déclin du Royaume-Uni.

@Daniel Leal / AFP
Le mini budget de Liz Truss provoque un maxi krach
Pendant ses 45 premiers jours, la Première ministre britannique veut faire renaître l’esprit de Margaret Thatcher. Elle se pose en leader de la croissance face au reste du monde qui se liguerait contre son programme pro-gaz de schiste et suppression des taxes pour les plus riches. Ce sont finalement les marchés financiers qui obtiennent la peau du projet et celle du ministre des Finances, Kwazi Kwarteng.
La mort d’Élisabeth II éclipse la nomination de Liz Truss
Il n’aura fallu que quelques jours à Liz Truss pour montrer que, sur les questions liées à l’environnement, elle est en parfaite contradiction avec le nouveau roi Charles, fort de ses engagements sur le climat et la protection de la biodiversité. En bonne ex-économiste de la compagnie pétrolière néerlando-britannique Shell, son programme consistait à relancer le gaz de schiste au Royaume-Uni et à exploiter à fond les réserves fossiles de la mer du Nord. Alors que le pays vient d’être condamné par les tribunaux à mettre sa stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre en accord avec ses engagements sur la neutralité carbone, cela fait désordre.
Liz Truss fait campagne sur l’anti-wokisme, comme les Républicains américains
Liz Truss a gagné la primaire du parti conservateur contre Rishi Sunak, ex-ministre des Finances de Boris Johnson sur une campagne très à droite, "anti-fonctionnaires, grévistes, wokes, panneaux solaires", et "pro-baisse d’impôts massive (35 milliards d’euros), exploration pétrolière en Mer du Nord et vitesse élevée sur les autoroutes". "There Is No Alternative" (TINA) disait Margaret Thatcher, son modèle. Or le modèle ultralibéral et anti-social sur le plan économique et plus que conservateur côté mœurs semble finalement peu adapté aux temps de crises majeures – énergétique, environnementale et sociale – que traverse le Royaume-Uni post-Brexit.
Liz Truss succède à Boris Johnson après 60 jours de vacance(s) de poste
Le désastreux et éphémère mandat de Liz Truss aura succédé à un non moins désastreux mais plus long mandat, celui de Boris Johnson. Chassé du 10 Downing Street début juillet 2022, il s’est mis ensuite en vacances en attendant son successeur, prenant le temps de se marier avec sa compagne. The Economist a salué sa sortie par une couverture titrée "La chute du clown". Pour annoncer la démission de Liz Truss, le média a même renommé la Grande-Bretagne Britaly, "ce pays politiquement instable, à faible croissance et soumis au bon vouloir des marchés obligataires !"
Anne-Catherine Husson-Traore @AC_HT_