BNP Paribas, Exane (gestionnaire de fonds, filiale de la BNP), la Société générale, Natixis et HSBC. Ces cinq banques ont fait l’objet ce mardi 28 mars d’une opération historique du Parquet national financier. Seize magistrats (sur 19 en poste) du PNF, 150 enquêteurs (sur plus de 250 en poste) du service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), ainsi que six procureurs allemands du parquet de Cologne ont participé à l’opération. Ces banques sont soupçonnées d’avoir eu recours à une combine fiscale sur les dividendes appelée "CumCum", qui pourrait avoir coûté plus d’un milliard d’euros au Fisc.
Ce scandale mondial a été dévoilé en 2018 par plusieurs médias européens dont Le Monde. Un hold-up en col blanc, initialement estimé à 55 milliards d’euros, qui a été réévalué à 150 milliards d’euros. Concrètement, la pratique dite "CumCum", dans le jargon financier, consiste à échapper à l’imposition sur les dividendes dont doivent en principe s’acquitter les détenteurs étrangers d’actions d’entreprises françaises cotées.
"Justice sociale, justice fiscale"
Pour profiter de la combine, ces propriétaires d’actions, petits épargnants ou grands fonds d’investissement, confient leurs titres à une banque au moment de la collecte de la taxe, échappant ainsi à l’imposition. Les banques auraient joué un rôle d’intermédiaire, tout en prélevant une commission aux détenteurs d’actions.
BNP Paribas et Exane font ainsi l’objet d’enquêtes du PNF pour des soupçons de fraude fiscale aggravée et de blanchiment de fraude fiscale aggravée, après des signalements de l’administration fiscale. Les trois autres font l’objet d’enquêtes pour blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée. Ces dernières font partie des établissements visés fin 2018 par une plainte déposée par un collectif "Citoyens en bande organisée" autour du patron des députés PS Boris Vallaud. Dans un tweet, l’élu se "félicite" de l’enquête. "Notre plainte avec 250 landaises et landais il y a plus de quatre ans porte enfin ses fruits. Exigence de justice sociale, exigence de justice fiscale", écrit-il.
Un manque à gagner en pleine réforme des retraites
Cette perquisition intervient dans un monde de grande tension pour le secteur bancaire. Après la chute de la Silicon Valley Bank, de Silvergate et de Signature outre-Atlantique, c’est la banque
Crédit Suisse qui était menacée de faillite. Son rival UBS l’a rachetée en un week-end mais c’est désormais
Deutsche Bank qui montre des signes d’affaiblissement. Est-ce les prémices d’une crise financière ?
En plus du contexte financier, c’est aussi le contexte social explosif qui pose question. En pleine mobilisation contre la réforme des retraites, le manque à gagner de cette fraude fiscale est colossal.
"Ce sont plusieurs milliards volés à l’État français chaque année. Il y a une certaine "réforme des retraites" pour un "potentiel déficit de 12 milliards annuel" qui fait l’actualité. Si le gouvernement cherchait comment financer les retraites, il suffit de demander à ces banques. L’argent est là, il suffit d’aller le chercher", écrit Thomas Wagner, alias
Bon Pote, sur Linkedin.
AFP avec Marina Fabre Soundron