Les années se succèdent et les catastrophes empirent. Alors que déjà en 2020, l’Amazonie subissait son pire mois de juin depuis 13 ans, cette année 2021 bat un nouveau record. Selon les données officielles rendues publiques le 1er juillet, ce mois de juin a été le plus dévastateur depuis 2007. Les satellites de l’Institut national de la recherche spatiale (INPE) ont détecté 2 308 foyers d’incendie, soit 2,3 % de plus qu’en juin l’année dernière. Une situation dramatique alors que saison sèche n’a pas encore commencé. Les mois d’août et septembre pourraient ainsi subir des incendies historiques.
Ces chiffres confirment une tendance, qui, selon les écologistes, est encouragée par les prises de position du président d’extrême droite Jair Bolsonaro favorable à l’ouverture des activités minières et agricoles en Amazonie. "L’augmentation des départs de feu en Amazonie n’est pas une surprise, c’est le résultat d’actions directes qui incitent à l’illégalité et fragilisent les organes de contrôle, comme la réduction de 60 % du budget 2 021 pour la surveillance des incendies", déplore l’ONG Institut socio-environnemental (ISA) dans un communiqué transmis à l’AFP.
Interdiction des brûlis
Sur l’ensemble de l’année 2020, quelque 103 000 incendies ont été recensés dans le biome amazonien, soit une augmentation de 16% en un an, selon l’INPE. Ces incendies sont la conséquence de la déforestation pour faire place à l’agriculture et à l’élevage du bétail, selon les experts. Le gouvernement brésilien a publié cette semaine un décret interdisant les brûlis pendant quatre mois et a autorisé l’envoi de l’armée en Amazonie pour lutter contre la déforestation et l’exploitation minière illégale.
Deux stratégies qui, selon Greenpeace Brésil "ont échoué de manière incontestable au cours des deux dernières années". Jair Bolsonaro s’est récemment engagé auprès de la communauté internationale à éliminer la déforestation illégale au Brésil d’ici 2030, sans annoncer de mesures concrètes pour atteindre cet objectif. Mais c’est aussi la responsabilité des puissances qui importent du soja brésilien qui est pointée du doigt.
The forest is burning! Last month, Brazil recorded the most fires in the Amazon in 14 years for the month of June. Fire is used by the agribusiness in the deforestation process, as seen on this shocking video by photographer and videographer Kamikia Kisedje. pic.twitter.com/9Y7vOExLli
— Greenpeace (@Greenpeace) July 1, 2021
La part de complicité de la France
Emmanuel Macron avait ainsi reconnu en 2019, lorsque le monde découvrait les terribles incendies qui ravageaient l’Amazonie, la "part de complicité" de la France dans cette situation. L’Europe est en effet fortement dépendance de l’importation de soja sud-américain. Chaque année, selon Greenpeace, l’Hexagone importe 3,5 millions de tonnes de soja, participant ainsi à la déforestation. L’ONG a d’ailleurs bloqué fin mai un entrepôt stockant du soja importé dans le port de Saint-Nazaire. Pour remédier à cette situation, Emmanuel Macron a lancé fin 2019 un plan de souveraineté protéinique.
Mais il y a urgence. Une récente étude publiée dans Nature Climate Change estime que la forêt amazonienne rejette désormais plus de carbone qu’elle n’en absorbe. Entre 2010 et 2019, ses émissions de carbone ont été 18 % supérieures aux absorptions, indique dans un communiqué l’Institut français de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Un basculement qui ne concerne auourd’hui que la partie brésilienne de la forêt amazonienne mais qui pourrait s’étendre à l’ensemble de l’Amazonie prochainement.
Marina Fabre, @fabre_marina avec AFP