Derrière le jet de soupe sur la Joconde se cache le collectif “Dernière rénovation” devenu “Riposte alimentaire”

La scène a fait le tour des médias internationaux. Dimanche 29 janvier, au cœur du Louvre, deux militantes ont éclaboussé le tableau de la Joconde avec de la soupe. “Qu’est-ce qui est le plus important ? L’art ou le droit à une alimentation saine et durable ?”, ont clamé les activistes après s’être glissées sous la barrière de sécurité qui borde l’œuvre. Sur le t-shirt de l’une d’entre elles, deux mots en lettres noires : Riposte alimentaire.

Protégé par une vitre blindée, le tableau de Léonard de Vinci n’a connu aucun dommage. Pourtant, en quelques heures seulement, l’action est devenue virale, entraînant tout autant des critiques, que des marques de soutien. Son propos : attirer l’attention sur le lancement d’une nouvelle campagne de désobéissance civile dénonçant les conséquences de l’insécurité alimentaire. En 2020, “entre 5 et 7 millions” de français ont eu “recours à l’aide alimentaire”, alors que “20% de la nourriture produite est jetée” rappellent les militants à l’origine de l’action coup de poing.

Dans un communiqué de presse, ils évoquent également les conditions de travail dégradées des agriculteurs, actuellement en pleine mobilisation dans toute la France. Riposte alimentaire pointent du doigt la pression exercée par la grande distribution mais aussi “les traités de libre-échange européens” qui “créent les conditions d’une concurrence déloyale entre l’agriculture nationale et les produits étrangers”. Face à ces conséquences sociales, couplées aux impacts environnementaux liés aux émissions de gaz à effet de serre du secteur ou à l’usage d’intrants, ce nouveau mouvement porte une revendication unique : la mise en place d’une Sécurité Sociale de l’Alimentation Durable.

“L’alimentation est à la base de nos besoins, elle devrait être considérée comme un droit, explique à Novethic Catalina, une citoyenne engagée au sein de Riposte alimentaire. Nous souhaitons son intégration dans notre modèle social”. L’objectif est d’offrir à chaque citoyen la somme de 150€ par mois afin de faciliter l’achat de produits sains et durables. Une mesure ambitieuse, déjà testée à Montpellier, Toulouse ou encore Bordeaux et qui fera l’objet d’une expérimentation à Paris dans le courant de l’année. “Nous espérons réussir à provoquer un débat politique nationale sur le sujet, comme nous avions réussi à faire pour la rénovation thermique”, abonde Catalina.

Car les activistes de Riposte alimentaire n’en sont pas à leur coup d’essai. La campagne prend la suite de la mobilisation menée ces deux dernières années par Dernière rénovation. Lancé en avril 2022, le collectif réclamait l’obtention d’un large plan de rénovation thermique des bâtiments. “Une ambition concrète, réalisable, juste socialement et populaire”, expliquait-t-il alors. Le 18 décembre 2023, le réseau annonçait raccrocher, temporairement, ses gilets orange après 21 mois de mobilisation. Avec 188 actions au compteur, le collectif a considéré être arrivé au bout de ses objectifs. “Démocratiquement, nous avons gagné tout ce que nous pouvions gagner”, estime Pierre Taieb, l’un des coordinateurs de la campagne, interrogé par le média Usbek et Rica.

“Nous avons finalement réussi (…) à débloquer 1,6 milliards d’euros pour la rénovation thermique des bâtiments”, souligne le militant. Une enveloppe “pas insignifiante” même si “ça n’est toujours pas assez”, concède-t-il. En mettant à l’agenda ses nouvelles revendications, le mouvement renouvelle donc la pression médiatique et politique. “Avec cette campagne, on entre en résistance civile pour se battre pour la dignité de toutes et tous”, fait valoir Catalina. Mais aussi “pour démontrer qu’un monde juste, désirable et qui respecte les limites planétaire est possible”.