Publié le 16 janvier 2023
ENVIRONNEMENT
Greta Thunberg fait de la mine de Lützerath le centre du combat contre les énergies fossiles
Lützerath, petit village allemand protégé depuis des mois par des activistes environnementaux opposés à la mine de charbon géante de RWE, est devenu ce week-end le centre de l’affrontement autour des énergies fossiles. D’un côté ceux qui veulent stopper maintenant celles qui nuisent le plus au climat comme le charbon, de l’autre un gouvernement allemand qui fait face à la crise du gaz russe en le remplaçant par la lignite dont il veut sortir en 2030 pour respecter ses engagements plus lointains de neutralité carbone.

Ina Fassbender / AFP
La visite et les mots de Greta Thunberg samedi 14 janvier à Lützerath, petit village de Rhenanie, transformé en ZAD contre la plus grande mine de charbon d’Europe développée par RWE, portent beaucoup plus loin que l’Allemagne qu’elle a mis face à ses contradictions climatiques. "Le pays est l’un des plus gros émetteurs mondiaux et il a une énorme responsabilité. Nous devons lui demander des comptes" a-t-elle déclaré, ajoutant : "Le contrat passé par le gouvernement avec RWE est honteux. Il nous montre que ses priorités ne sont pas les humains mais les profits et il échoue dans la lutte pour protéger contre le climat".
What a powerful speech from @GretaThunberg!
‘When governments and cooperations fail like they are doing now, people are stepping up. The fact that all of you are here, is a sign of hope.’#LuetziBleibt #AlleDoerferBleiben pic.twitter.com/KVqKzl8t08— Maarten de Zeeuw (@maarten_dezeeuw) January 14, 2023
Greta Thunberg a conclu en disant que "ce qui se passe à Lützerath ne reste pas à Lützerath". Robert Habeck, le ministre écologiste de l’Économie et du Climat tente d’assumer sa position affirmant que le combat climatique ne doit pas cibler la mine pour laquelle il a effectivement passé un accord avec RWE. L’entreprise s’est engagée à sortir progressivement du charbon en2030 à condition qu’on lui laisse finir sa mine. La guerre en Ukraine et la stratégie de Poutine "nous oblige à utiliser temporairement plus de lignite pour économiser du gaz dans la production d’électricité. C’est douloureux, mais nécessaire compte tenu de la pénurie de gaz" avait expliqué début octobre dans un communiqué de presse celui qui incarne la politique climat du gouvernement. Il a rappelé sa position, lors du lancement de l’évacuation du site le 11 janvier. Pour lui l’exploitation de la plus grande mine de charbon d’Europe est compatible avec les engagements de sortie du charbon de l’Allemagne pris pour 2030.
Si les premiers jours de l’évacuation, prévue pour durer de longues semaines, ont été calmes, la manifestation massive de samedi a dégénéré. Les brutalités policières envers les manifestants ont été dénoncées sur les réseaux sociaux. Le 17 janvier, Greta Thunberg a d'ailleurs été arrêtée quelques heures par la police.
This is #Germany! Yesterday!
For profit police are brutal against people for life!#LütziBleibt #EndCoal #Lutzerath
Science proves #Luetzerathbleibt needs to be saved!
Share to support & tell police to back down pic.twitter.com/nuwfgDP6JF— Janine Climate #StandWithUkraine (@JanineClimate) January 14, 2023
Ces images rappellent celle des manifestations contre les mégabassines en France à l’automne dernier dans les Deux Sèvres. Lützerath en Allemagne ou Sainte-Soline en France illustrent les fractures profondes des pays européens entre les activistes écologiques qui veulent protéger le climat et l’eau ici et maintenant dans des lieux symboliques, et des gouvernements qui prennent des engagements à long terme et globaux sans avoir vraiment lancé la transition énergétique permettant de s’affranchir des énergies fossiles.
La guerre en Ukraine a révélé l’impasse de la situation actuelle qui freine considérablement le Pacte Vert pris en 2021. La tragédie des horizons reste palpable dans le combat climatique car au-delà du clivage générationnel c’est bien la nature même de la politique, agir maintenant pour plus tard, qui se joue à Lützerath. Les scientifiques sont formels : remettre à plus tard le renoncement au charbon aggravera la crise climatique dont les effets s’accélèrent, y compris en Allemagne. Les inondations dramatiques de l’été 2021 avaient contribué à porter au pouvoir la coalition actuelle où le poids des écologistes est important. La guerre en Ukraine a été un révélateur. Le pays, leader mondial de l’industrie automobile et européen de la chimie, n’a pas vraiment commencé à transformé son industrie, pilier de son économie l
Anne-Catherine Husson-Traore, @AC_HT_, directrice générale de Novethic