Publié le 02 novembre 2021

ENVIRONNEMENT

COP26 : 100 pays s'engagent à mettre fin à la déforestation d'ici 2030, une promesse trop molle pour les ONG

La France, les États-Unis ou encore le Brésil et la République démocratique du Congo s'engagent à mettre fin à la déforestation d'ici neuf ans. Au total, 12 pays vont investir 16,5 milliards d'euros pour restaurer les terres dégradées, lutter contre les incendies et soutenir les communautés autochtones. Toutefois, la participation du Brésil, notamment, interpelle, alors que son président est régulièrement critiqué pour avoir permis une déforestation massive de l’Amazonie. Par ailleurs, des ONG rappellent que cet objectif n'est pas nouveau.

Cop 26 Deforestation
100 pays s'engagent à stopper la déforestation à la COP 26
ANDY BUCHANAN, AFP

Première annonce d’envergure à l'occasion de la COP 26 qui a débuté ce dimanche à Glasgow : plus de 100 dirigeants mondiaux promettent de mettre fin à la déforestation d’ici 2030 alors que les forêts reculent à un rythme alarmant sur la planète. Au total, les signataires représentent plus de 85 % des forêts de la planète avec le Brésil, le Canada, la Russie, l'Indonésie ou encore la République démocratique du Congo.

Ainsi, 12 pays, dont la France, se sont engagés à mobiliser conjointement 8,75 milliards de livres (10,28 milliards d’euros) de fonds publics entre 2021 et 2025, auxquels s’ajoutent 5,3 milliards de livres (6,2 milliards d’euros) d'investissements privés. Par ailleurs, les PDG de plus de 30 institutions financières représentant plus de 8 700 milliards de dollars d'actifs mondiaux - dont Aviva, Schroders ou Axa - s'engagent à ne plus financer d’activités liées à la déforestation.

Au total, les pays vont investir ensemble 16,5 milliards d'euros pour restaurer les terres dégradées, lutter contre les incendies et soutenir les communautés autochtones. Selon la note du gouvernement britannique, il s'agit du "plus grand pas en avant dans la protection des forêts mondiales en une génération".

"Nous veillerons à ce que les promesses soient tenues"

Sur ces montants, 1,1 milliard de livres seront notamment destinés à protéger le bassin du Congo, qui abrite la deuxième plus grande forêt tropicale du monde. Joseph Itongwa Mukumo, indigène Walikale de la République Démocratique du Congo, et coordinateur du Réseau des Peuples Autochtones, se réjouit de cet accord qui "mentionne les peuples autochtones". Il ajoute qu’il rêve du jour où "les secteurs politiques et économiques se mobiliseront pour garantir le maintien des communautés, non seulement parce que c'est la bonne chose à faire, mais parce que c’est (…) une solution efficace pour lutter contre la déforestation qu'ils n'ont pas pu arrêter seuls".

De son côté, Roberto Waack, chef d'entreprise et biologiste brésilien, qualifie l’accord "d’étape importante sur la voie de la protection de nos précieuses forêts et de la lutte contre la crise climatique". Mais ce dernier affiche sa vigilance : "aujourd'hui nous célébrons cet accord et demain nous veillerons à ce que les promesses soient tenues". A l’image de Joseph Itongwa Mukumo et Roberto Waack, les associations et les scientifiques ne cachent pas leur méfiance à l’égard des pays signataires. Selon Greenpeace, "bon nombre de ces gouvernements ont l'habitude de bafouer les droits autochtones et de détruire les forêts. Ils doivent fournir l'assurance que ces fonds n'iront pas aux destructeurs de forêts", lance l’ONG.

Le Brésil s’est notamment illustré pour avoir accéléré la déforestation de l’Amazonie. Jair Bolsonaro et son administration sont d'ailleurs la cible de plaintes dont celle de l'ONG autrichienne AllRise qui évalue à près de 4 000 km2 de forêt amazonienne détruite chaque année avec un rythme qui s'est accru de 88% depuis l'arrivée au pouvoir du dirigeant d'extrême droite.

 

Par ailleurs, cet engagement est jugé trop faible et trop lointain par les défenseurs de l'environnement. Selon Greenpeace, "c'est une infime fraction de ce qui est nécessaire pour protéger la nature dans le monde". L’ONG estime en outre que l'objectif de 2030 est beaucoup trop loin dans le temps et donne ainsi le feu vert à "une décennie supplémentaire de déforestation". L'association Canopée rappelle que cet accord n'est pas nouveau :"La plupart des signataires, dont la France, s'étaient déjà engagés à mettre fin à la déforestation importée en 2020", rappelle ainsi Sylvain Angérand, coordinateur de campagne de l'ONG Canopée qui œuvre pour la protection des forêts mondiales, sur France Info. "Nous n'avons pas atteint cet objectif et nous le décalons simplement à 2030. C'est inquiétant", ajoute le spécialiste.

Mathilde Golla @Mathgolla


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