Publié le 07 mars 2019
ENVIRONNEMENT
Surmortalité, mariage forcé, déscolarisation... Les femmes sont les premières victimes du réchauffement climatique
Les femmes sont en première ligne face au réchauffement climatique. Elles ont 14 fois plus de risque de mourir lors de catastrophes climatiques et subissent au quotidien ces effets, particulièrement dans les pays en développement. À l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes le 8 mars, Novethic vous explique en cinq points comment le réchauffement climatique pèse en premier lieu sur les femmes.

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1. Les femmes ont 14 fois plus de risque de mourir en cas de catastrophes naturelles
Le réchauffement climatique touche particulièrement les plus pauvres, catégorie dans laquelle les femmes sont surreprésentées. Elles ont 14 fois plus de risques de mourir en cas de catastrophe naturelle que les hommes, selon les données de l’ONU. "Ce chiffre s’explique par des inégalités entre les sexes qui sont préexistantes. Lorsque la catastrophe survient, elles ont moins accès à l’information, ne trouvent pas les solutions de replis et doivent en plus s’occuper des enfants", explique Armelle Le Comte chargée des questions environnementales et énergétiques à Oxfam. "D’autant qu’elles doivent faire face à la prédation de certains hommes", ajoute Céline Mas, présidente d’ONU Femmes France. "Sans tomber dans la caricature, on sait que les femmes sont violées ou violentées notamment dans des situations de vulnérabilité comme celle-ci", explique-t-elle.
2. Les catastrophes climatiques provoquent une augmentation des mariages forcés
Autre conséquence invisible du réchauffement climatique : les mariages forcés. On en compte 15 millions chaque année dans le monde. "Nous n'avons pas de chiffres détaillés, mais je dirais que 30 % à 40 % des mariages d'enfants au Malawi sont dus aux inondations et aux sécheresses causées par le changement climatique", révèle Mac Bain Mkandawire, le directeur exécutif de Youth Net and Counselling, une organisation qui lutte pour les droits des femmes et des enfants. "Selon nos estimations, environ 1,5 million de filles risquent de se marier en raison d'événements liés au changement climatique dans le pays. C'est énorme." Les événements extrêmes liés au changement climatique poussent en effet de plus en plus de familles à sacrifier une ou plusieurs filles, car elles ne parviennent plus à subvenir à leurs besoins.
3. L’agriculture et les femmes : la double peine
Les évènements climatiques touchent une des principales ressources des femmes dans les pays en développement : l’agriculture. Sous l'effet des sécheresses, inondations, canicules, les cultures sont mises à rude épreuve. Or, en Afrique subsaharienne ou en Asie, 80 % de la production alimentaire repose sur un modèle familial en majorité cultivé par des femmes. "Celles-ci dépendent plus que les hommes des ressources naturelles car c’est leur seul moyen de subsistance", explique Armelle Le Comte. "Avant même les catastrophes climatiques, elles subissent déjà des inégalités : elles ne sont pas propriétaires des terres, elles ont moins accès aux crédits et aux formations…" Aujourd’hui, 60 à 80 % de la production agricole dans les pays en développement reposent sur les femmes mais elles ne touchent que 10 % des revenus générés.
4. Moins d’eau, moins de bois, plus de distance
Dans de nombreuses régions, les femmes sont en charge du foyer. Elles doivent aller chercher l’eau et le bois pour se chauffer et cuisiner. Or, les ressources se raréfient avec le réchauffement climatique et les femmes doivent parcourir de plus grandes distances pour collecter ces produits. "Pour couvrir les besoins d’une famille de cinq personnes, il faut au minimum une centaine de litres d’eau par jour", atteste l’Organisation mondiale de la Santé. "Pendant la saison sèche en Inde et en Afrique, la corvée d’eau absorbe au moins 30 % de l’apport calorique journalier des femmes en milieu rural". Au-delà de l’impact sur la santé, ces charges demandent plus de temps aux femmes au détriment d’activités rémunératrices. Et une surcharge de travail pour la mère provoque une déscolarisation précoce pour les petites filles qui doivent les aider.
5. Les financements insuffisants des pouvoirs publics
Lors de la COP21 en 2015, une centaine de personnalités avait lancé un appel pour "soutenir les femmes face au changement climatique". Aujourd’hui, les financements peinent à se constituer. "De plus en plus de fonds prennent en compte les inégalités entre femmes et hommes, mais cela reste insuffisant", admet Armelle Le Comte d’Oxfam. "C’est une niche", ajoute la présidente d’ONU Femmes France. Un des problèmes pour passer de la prise de conscience à l’action, au financement, réside notamment dans le manque de données sur les conséquences du réchauffement climatique sur les femmes. "Si on veut convaincre les décideurs il ne faut pas seulement mettre en avant l’aspect moral, mais leur montrer, sur des données solides qu’il y a un réel enjeu économique et social", explique Céline Mas.
La Banque Mondiale a montré que si les femmes avaient les mêmes droits que les hommes, "le monde serait non seulement plus juste, mais aussi plus prospère". Et pour cause, un meilleur accès des femmes à l'emploi permettrait d'injecter 5 800 milliards d'euros dans l'économie mondiale estime l'Organisation internationale du travail.
Marina Fabre, @fabre_marina