Publié le 17 décembre 2017
ENVIRONNEMENT
[LE CHIFFRE] Entre 30 % et 40 % des mariages forcés de mineurs au Malawi sont liés au changement climatique
C’est une autre conséquence – insoupçonnable – du réchauffement climatique. La pauvreté et la faim provoquées par des catastrophes naturelles conduisent à une hausse des mariages forcés de mineurs. Selon l’Unicef, le nombre de ces unions pourrait doubler et atteindre jusqu'à 310 millions d'ici 2050, si la tendance actuelle se poursuit.

"Nous n'avons pas de chiffres détaillés, mais je dirais que 30 % à 40 % des mariages d'enfants au Malawi sont dus aux inondations et aux sécheresses causées par le changement climatique", révèle Mac Bain Mkandawire, le directeur exécutif de Youth Net and Counselling, une organisation qui lutte pour les droits des femmes et des enfants. "Selon nos estimations, environ 1,5 million de filles risquent de se marier en raison d'événements liés au changement climatique dans le pays. C'est énorme."
Chaque année, quelques 15 millions de jeunes filles mineures sont mariées de force dans le monde, soit 37 000 enfants par jour. Selon l’Unicef, le nombre de ces unions pourrait doubler et atteindre jusqu'à 310 millions d'ici 2050, si la tendance actuelle se poursuit. Les événements extrêmes liés au changement climatique poussent en effet de plus en plus de familles à sacrifier une ou plusieurs filles, car elles ne parviennent plus à subvenir à leurs besoins.
Une nouvelle génération d’enfants mariés de force
"Pour de plus en plus de jeunes filles en Afrique, la manifestation la plus palpable du changement climatique, c'est le bébé qu'elles tiennent dans leurs bras alors qu'elles s'assoient pour regarder leurs amies aller à l'école", écrit ainsi Gethin Chamberlain, journaliste membre d’un groupe d’investigation sur la façon dont le changement climatique crée une nouvelle génération d’enfants mariés de force, baptisé "Brides of the sun" (Les épouses du soleil).
Du Malawi au Mozambique, les témoignages sont les mêmes. Ntonya a été mariée de force à 13 ans après avoir supplié ses parents de ne pas le faire. Mais face aux inondations qui ont ravagé toutes leurs récoltes, la perspective d'avoir une bouche de moins à nourrir les a vite fait trancher.
Dix mois plus tard, la jeune fille donnait naissance à son premier enfant. Carlina, mariée elle aussi à 13 ans, explique qu’elle ne voulait pas se marier si jeune et qu’elle aurait voulu aller à l’école. Pour Maliya, mise enceinte par son professeur à 15 ans, le mariage n’a finalement rien arrangé. Elle a arrêté d'aller à l'école et ne parvient pas à subvenir aux besoins de son garçon de six mois.
Des bancs d’école vides
"Les filles ont tendance à abandonner l’école pendant la période avant le mariage ou peu de temps après. Leur nouveau rôle d’épouse ou de mère consiste à prendre soin de la maison, des enfants et de la famille”, explique l’ONG Girls not Brides qui tire la sonnette d’alarme face au lien entre le changement climatique et l’augmentation des mariages des mineures.
Le Mozambique occupe la 9e place dans le classement mondial relatif au mariage des enfants, avec près d'une fille sur deux qui se marie avant 18 ans, et une sur sept avant 15 ans. D’autres États comme le Malawi ont interdit le mariage entre mineurs. En vain. Selon le collectif de journalistes Brides of the sun, nous assistons là à "un désastre humanitaire, caché en pleine vue, causé par des bouleversements climatiques dont on n’imagine les conséquences que dans un lointain futur apocalyptique : celui de toute une génération d’enfants mariées dont le changement climatique accouche en silence sous nos yeux".
Concepcion Alvarez, @conce1