Publié le 17 janvier 2018
ÉNERGIE
Notre-Dame-des-Landes abandonné par Édouard Philippe, le gouvernement prépare l’évacuation de la ZAD
Après six mois de médiation et une ultime consultation, l'exécutif a choisi d'abandonner le projet controversé d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, malgré des décisions de justice et un référendum local favorables. Matignon a informé des élus locaux, peu avant une déclaration du Premier ministre Edouard Philippe à la sortie du Conseil des ministres à l'Elysée.

AFP
"C'est officiel. C'est abandonné", a déclaré Philippe Grosvalet, président du syndicat mixte aéroportuaire du Grand Ouest et président du conseil départemental de Loire-Atlantique. Ainsi prend fin le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, initié et débattu depuis 50 ans.
Prévenu par un conseiller de Matignon, ce tenant du projet a fustigé "un véritable reniement" et "une très très mauvaise décision du président de la République". L'alternative devrait être d'aménager l'actuel aéroport Nantes-Atlantique, comme l'envisageaient des médiateurs dans leur rapport remis le 13 décembre.
Malgré les multiples rejets des recours en justice des anti-aéroport, le soutien au projet d'une majorité des élus de Bretagne et des Pays-de-la-Loire, et un référendum consultatif local favorable (55,17 %) en Loire-Atlantique en juin 2016, l'exécutif a préféré lâcher "NDDL".
Né dans les années 60, relancé en 2000, attribué à Vinci par appel d'offres en 2010, l'aéroport "du Grand Ouest" a traversé un demi-siècle pour finalement devenir le symbole des atermoiements du quinquennat Hollande et le conflit environnemental le plus emblématique du pays.
Difficile évacuation en vue
Édouard Philippe, qui a rencontré plus de 100 élus de l'Ouest depuis début janvier et s'est rendu discrètement samedi à la mairie de Notre-Dame-des-Landes, avait reconnu mardi, devant les députés LREM, la difficulté de trancher. "Quelle que soit la réponse, elle sera mauvaise" car elle fera des mécontents, a-t-il admis. Malgré l'abandon, l'exécutif s'est engagé à évacuer la ZAD.
Des renforts de sept escadrons de gendarmerie mobile, soit plus de 500 hommes, sont attendus mercredi sur place, selon une source proche du dossier, avec pour objectif de quadriller la zone et procéder à des contrôles afin d'éviter l'arrivée de civils dans la Zad. Plusieurs compagnies de CRS seront à Nantes et Rennes afin d'assurer le maintien de l'ordre en cas de manifestations.
Pour ses partisans, le nouvel aéroport devait permettre d'assurer le développement attendu du trafic aérien depuis Nantes, une des villes françaises à la plus forte croissance, face à la saturation attendue de Nantes-Atlantique dans sa version actuelle. Et ainsi améliorer la desserte de toute la Bretagne.
"Il faudra gérer la déception des partisans de l'aéroport, c'est une désillusion pour eux c'est certain", reconnaît un parlementaire. "Mais ce sont principalement des élus, il n'y a pas de mouvement citoyen de masse pour l'aéroport", ajoute-t-il.
Pour ses opposants, Notre-Dame-des-Landes était devenu un de ces "grands projets inutiles", condamnant un bout de bocage au nom du développement d'un mode de transport contradictoire avec les objectifs de la France de réduire ses émissions de gaz à effet de serre.
Dédommager Vinci
L'agrandissement de Nantes-Atlantique, une option longtemps écartée par les pouvoirs publics en raison notamment de la présence d'une zone naturelle protégée à proximité et de la problématique du survol de Nantes, reste toutefois entouré d'incertitudes.
"Il s'agit de rallonger la piste vers le sud, l'extension des terminaux, l'aménagement des pistes de circulation pour les avions et changer la pente de la piste pour réduire les nuisances sonores", explique un des élus partisans de cette option. "Rallonger la piste en tant que tel prendrait six semaines. Au total, je pense qu'en deux ans tout peut être réglé".
Une version vivement contestée par les élus partisans de Notre-Dame-des-Landes, comme l'ex-président LR de la région Pays de la Loire, Bruno Retailleau ou la maire PS de Nantes Johanna Rolland, selon qui "on repart pour dix ans".
L’abandon du projet d’aéroport soulève désormais la question épineuse de l'indemnisation prévue pour Vinci qui, selon le rapport remis à Edouard Philippe, pourrait aller jusqu'à 350 millions d'euros. Le PDG de Vinci Xavier Huillard a évoqué mardi un contrat "béton" après des rumeurs démenties de contestation de certaines clauses du contrat par l'État.
Certains élus suggèrent une négociation avec le géant du BTP, également exploitant de Nantes-Atlantique et qui se place en vue de la possible privatisation d'Aéroports de Paris (ADP).
La Rédaction avec AFP