Publié le 2 décembre 2024

Carlos Tavares, le dirigeant le mieux rémunéré de son secteur s’est fait démissionner “avec effet immédiat” par le conseil d’administration de Stellantis le dimanche 1er décembre. Il paye une accumulation de risques ESG et de pressions insupportables pour ses parties prenantes ! Il démontre ainsi que les vieilles recettes ne fonctionnent plus dans un secteur en difficulté.

La chute brutale de Carlos Tavares, évincé à l’unanimité du Conseil d’administration de Stellantis réuni dimanche 1er décembre à Amasterdam, montre que l’obsession de la performance financière “à deux chiffres” au prix d’une réduction des coûts tous azimuts qui pèsent sur l’ensemble des parties prenantes salariés comme fournisseurs et sous traitants, ne fait plus recette. La méthode Tavares a fait son temps mais elle coute cher au groupe. Il devrait partir avec plusieurs dizaines de millions d’euros négociés à son entrée en fonction.

Le dirigeant du groupe automobile voulait “sprinter” jusqu’en 2026 et prendre une retraite triomphale à 68 ans. Son conseil d’administration présidé par John Elkann, issu de la famille propriétaire de Fiat, les Agnelli premier actionnaire du groupe Stellantis, en a décidé autrement. Carlos Tavares a monté le groupe Stellantis qu’il dirigeait depuis 2021 en réunissant le groupe PSA et celui de Fiat Chrysler avec l’objectif d’en faire un groupe mondial permettant d’être l’un des survivants de la recomposition accélérée du paysage automobile mondial. La montée en puissance de la voiture électrique et le passage à une mobilité durable qui n’implique plus forcément d’acheter une voiture transforment radicalement le modèle et la baisse des coûts imposée avec intransigeance ne peut suffire à s’y adapter.

Des coupes budgétaires qui ont grippé le fonctionnement de l’entreprise

Pour dégager de cet ensemble une performance à deux chiffres, Carlos Tavares a réduit tous les coûts de façon drastique finissant par dresser contre lui toutes ses parties prenantes et par gripper le bon fonctionnement de l’entreprise. La méthode du dirigeant de l’ex dirigeant de Stellantis témoigne de l’inefficacité des méthodes “à l’ancienne” face à des risques ESG qui prennent de l’ampleur. Il les cumulait des problèmes de cette nature des airbags défaillants à la procédure intentée aux Etats Unis par des actionnaires qui l’accusent d’avoir menti sur l’état de ses stocks pour cacher la baisse des ventes en passant par les difficultés du moteur Pure tech.

Stellantis paye au prix fort un cumul de risques ESG

Les concessionnaires sont tout aussi mécontents que les fournisseurs, les salariés et les cadres du groupe qu’ils ont été plusieurs à quitter ces derniers mois ! Le conseil d’administration a fini par tirer les conclusions de toutes ces doléances. Carlos Tavares n’était plus l’homme de la situation. Dans le communiqué officiel du groupe automobile, le président John Elkann le remercie “pour ses années de service dévoué et le rôle qu’il a joué dans la création de Stellantis en complément des redressements de PSA et d’Opel, nous mettant sur la voie de devenir un leader mondial dans notre industrie.” Il ajoute : “Ensemble nous veillerons à poursuivre le déploiement de la stratégie de l’entreprise dans l’intérêt de long terme de Stellantis et de l’ensemble de ses parties prenantes.”

Défiance des actionnaires depuis plusieurs mois

La clef des divergences apparues entre Carlos Tavares et le conseil d’administration du groupe réside bien là. Les principaux actionnaires du groupe sont les familles Agnelli et Peugeot ainsi que la Banque Publique d’Investissement et la Caisse des dépôts (dont Novethic est une filiale). La combinaison des contre-performances boursières de Stellantis (-40 % depuis janvier 2024 et 5 % supplémentaires avec l’annonce du départ de son dirigeant) et du mécontentement général de toutes les parties prenantes ont eu raison de leur soutien à la méthode Tavares. La défiance était la depuis plusieurs mois puisqu’un tiers des actionnaires avaient contesté sa rémunération en avril dernier.

Son départ fait écho à la chute de l’autre tycoon dont il a longtemps été le numéro deux chez Renault Carlos Ghosn en 2020. Hommes providentiels du secteur automobile dont ils ont tenté d’inventer le futur, ils ont sombré de manière différente mais le message est le même. Ce modèle de dirigeant n’est pas adapté à la tempête qu’affronte le secteur entre le raz de marée des constructeurs chinois et le ralentissement inéluctable des ventes, en Europe et ailleurs.

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