La compagnie s’appuyait sur le Giec pour expliquer son mécanisme de compensation carbone. "Les experts du climat et notamment le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) soutiennent le principe qu’une quantité de CO2 émise à un endroit peut être compensée par des programmes en faveur de la captation carbone- notamment forestière – et de la transition énergétique développés ailleurs sur la planète", écrivait Air France sur son site Internet. Mais elle a dû faire marche arrière après avoir été interpellée par deux membres du Giec sur Twitter.
La paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte a ainsi interpellé Air France en indiquant que "la référence au Giec était incorrecte". Et de lui demander de "communiquer plus clairement l’impact climat aux usagers, de mieux expliquer les potentiels et limites de vos actions de compensation, et d’éviter l’utilisation de la notion de ‘neutralité’ carbone" effectivement très controversée.
@AirFranceFR Bonjour, la référence au #GIEC de votre site internet est incorrecte. Le GIEC ne fait pas de recommandation, et ne soutient pas ces options (1/6) pic.twitter.com/fX1ZJQR42f
— Val. Masson-Delmotte (@valmasdel) July 27, 2020
"De la méconnaissance ou de l’instrumentalisation"
De son côté, le climatologue Christophe Cassou rappelle que le Giec n’est "aucunement prescriptif" et que la publication d’Air France s’apparente au mieux à de la "méconnaissance" et au pire à de l’"instrumentalisation". Valérie Masson Delmotte rappelle ainsi que "ni la déforestation évitée ni les investissements dans des énergies bas carbone" ne permettent de répondre à la neutralité carbone, qui "implique que chaque émission de CO2 dans l’atmosphère soit effacée par une élimination de la même quantité de CO2, retirée de l’atmosphère et stockée de manière durable" précise-t-elle.
"Un projet de reboisement permet effectivement de stocker du carbone pendant la durée de croissance de l’arbre, mais ensuite ? Ce stockage peut être à long terme (ex, utilisation du bois en construction) mais aussi éphémère (ex, bois pour chauffage)", ajoute encore la membre du Giec dans un thread. Elle conclut enfin qu’au-delà des émissions de CO2, l’aviation entraîne aussi “des trainées de condensation”, qui ont elles aussi un impact sur climat mais ne sont pas prises en compte dans le calcul de neutralité carbone évoqué par Air France.
Face à la polémique naissante, Air France a été obligée de modifier le paragraphe en question. Mais elle continue par exemple d’attribuer à certains de ses vols la notion de "neutre en carbone", comme c’est le cas pour ce Paris-Bordeaux, pointé du doigt par Jean-François Julliard, le directeur de Greenpeace France. Ce qui est d’autant plus problématique car ces vols internes devraient être supprimés en contrepartie des aides d’Etat versées quand il existe une alternative ferroviaire en moins de 2h30. Ce qui est bel et bien le cas de Bordeaux…
Petit vérif ce matin sur les vols intérieurs. pour préparer un rv.
1. Paris-Bordeaux existe toujours. 1h15 en avion contre 2h08 en train. Idem pour Paris-Lyon ou Paris-Rennes
2. @airfrance n’a pas peur du ridicule avec sa mention "neutre en CO2"
Urgence écologique, vraiment? pic.twitter.com/rQr5t0HKCh
— J-F Julliard (@jfjulliard) July 22, 2020
Concepcion Alvarez @conce1