Publié le 27 juillet 2024

A sec. Niché en plein cœur de la Sicile, le lac de Pergusa est aujourd’hui réduit à une flaque d’eau stagnante. Ce bassin naturel est la victime visible de la sécheresse qui frappe l’île depuis des mois. Novethic vous propose désormais chaque semaine un “pas de côté” sur l’actu.

Addio. Le 30 juin 2024, à 18h, des habitants de la région d’Enna se sont donnés rendez-vous à l’hippodrome de Pergusa pour célébrer des funérailles. Mais pas n’importe lesquelles, celles de son lac. Sur l’avis de décès, placardé un peu partout dans la région, on peut lire : “le lac de Pergusa est mort à cause de la désaffection de ses proches. Son extraordinaire beauté a nourri l’imagination d’écrivain comme Claudien, Ovide, Cicéron, Tite-Live, Diodorus Siculus et le poète anglais John Milton”.

Situé dans l’arrière-pays entre Catane et Palerme, ce lac naturel est désormais à sec. “En ces heures, après des mois d’agonie, le lac de Pergusa a presque complétement disparu. A sa place subsiste une tache noirâtre de boue humide qui sèche au soleil de cet été qui vient de commencer”, explique Giuseppe Maria Amato, représentant de la gestion des ressources en eau d’une association environnementale italienne, Legambiente. “Sa disparition, certainement imputable à la très grave crise climatique qui frappe la Sicile, a cependant été accélérée par l’inattention totale et l’inertie des organismes qui, au contraire, auraient dû intervenir”, ajoute-t-il.

La désertification en action

Les différentes vagues de chaleur et les faibles précipitations de ces derniers mois ont eu raison de son existence. “La situation est très grave et si nous continuons avec ces conditions de sécheresse hydrologique, elle fera qu’empirer”, affirme Gabriele Freni, professeur à la faculté d’ingénierie environnementale de l’Université Kore d’Enna, au quotidien Il Manifesto. Pour ce chercheur, “tout cela est principalement dû à l’origine endoréique du lac de Pergusa, c’est-à-dire sans affluent important, faisant de l’eau de pluie sa seule source d’approvisionnement, et qui a fait totalement défaut cette année”.

Vue avant/après du lac naturel de Pergusa, en Sicile
Vue avant/après du lac naturel de Pergusa, en Sicile
Crédit : AFP et Google images

Avant d’être asséché, ce lac naturel – l’un des seuls que compte la Sicile – était une étape importante pour les oiseaux migrateurs entre l’Afrique et l’Europe. “Aujourd’hui, c’est un désert également du point de vue de la vie”, explique Giuseppe Maria Amato. “Le changement climatique n’est pas à venir, nous y sommes et la plus grande victime est la biodiversité, s’alarme-t-il.

Les touristes devenus persona non grata

Et parmi les autres victimes collatérales de ce manque d’eau figurent le monde du tourisme. Dans la région d’Agrigente, à 70km à l’ouest du lac de Pergusa, les hôteliers ont décidé de limiter le nombre de touristes en raison de la pénurie d’eau. Depuis le mois de février, les autorités locales ont mis en place des mesures de restrictions et/ ou de rationnement en eau.

Sur TripAdvisor ou d’autres sites de voyages, certains établissements mettent notamment en garde les futurs vacanciers contre d’éventuelles coupures d’eau, et les invitent à réserver ailleurs sur l’île, là où les restrictions sont beaucoup moins sévères. En attendant, les autorités locales demandent à Rome à ce que certaines régions de la Sicile soient ravitaillées en eau par bateau pour faire face à cette crise sans pareil. A l’image de Barcelone, en Espagne, avant elles.

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