Publié le 3 juin 2025

Dix ans après le scandale du Dieselgate, la justice vient de condamner quatre des anciens dirigeants de Volkswagen à des peines de prison. Selon une nouvelle étude, cette fraude massive aurait provoqué la mort de 16 000 personnes en France. Malgré cette sombre page de son histoire, le groupe tente de relever la tête en pariant sur le véhicule électrique.

Dix ans après les révélations du “Dieselgate” sur l’utilisation de logiciels frauduleux pour minorer les émissions polluantes par le constructeur Volkswagen, et après quatre ans d’un procès fleuve, la justice allemande a condamné quatre de ses anciens dirigeants à des peines allant jusqu’à quatre années et demi de prison. Ils étaient poursuivis pour “fraude en bande organisée” après que Volkswagen a reconnu en 2015 avoir manipulé 11 millions de véhicules diesel pour tromper les tests antipollution, avec des émissions dépassant parfois jusqu’à 40 fois les normes autorisées.

“Les autorités chargées de certifier les voitures n’ont pas été informées que les émissions étaient beaucoup plus élevées en conditions réelles”, a déclaré le président du tribunal, Christian Schütz, lors de l’énoncé du verdict. Les quatre hommes rejoignent ainsi l’ancien PDG d’Audi Rupert Stadler, le premier à avoir été condamné dans cette affaire en juin 2023 à une peine de prison avec sursis et une amende de 1,1 million d’euros. Le principal accusé, Martin Winterkorn, ex-patron emblématique rapidement limogé après l’éclatement du scandale, est lui jugé dans un procès pénal distinct, qui n’a démarré que l’an dernier en raison de problèmes de santé. Il risque également une peine de prison, pouvant aller jusqu’à 10 ans.

16 000 morts en France

Le groupe pourrait également devoir répondre de ses actes en France. Le tribunal de Soissons a en effet jugé recevable une action de groupe contre le géant allemand. La Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie (CLCV), une association de défense des consommateurs, a initié depuis plusieurs années cette procédure contre plusieurs sociétés de la galaxie Volkswagen. Elle vise notamment sa filiale Volkswagen France, qui siège à Villers-Cotterêts dans l’Aisne. Le tribunal a aussi estimé que l’ensemble des marques du géant automobile allemand commercialisées en France – Audi, Skoda et Seat – étaient concernées.

Les propriétaires de près de 950 000 véhicules diesel du groupe en France au moment du scandale du dieselgate fin 2015 pourraient ainsi être éligibles à des réparations financières. Le groupe est également poursuivi au pénal en France, tout comme comme d’autres constructeurs accusés d’avoir eux aussi truqué les moteurs de leurs véhicules diesel, à l’instar de Renault, Peugeot, Citroën et Fiat-Chrysler également mis en examen mi-2021.

Une étude publiée mardi 28 mai par le Centre for research on energy and clean air (CREA), au lendemain des condamnations des quatre dirigeants, a démontré les impacts sanitaires de la fraude. En France, les émissions excédentaires de gaz toxiques auraient coûté la vie à 16 000 personnes entre 2009 et 2024. Elles pourraient être à l’origine de 8 000 décès prématurés supplémentaires d’ici à 2040, si les véhicules défectueux – environ trois millions seraient encore en circulation – ne sont pas remplacés ou rappelés pour être mis aux normes. A l’échelle de l’Union européenne (UE) et du Royaume-Uni, le fardeau est estimé à 205 000 décès prématurés sur la période 2009-2040 et à un coût économique de 1 200 milliards d’euros.

“Plus de 100 milliards d’euros”

Cette affaire, l’un des plus gros scandales de l’histoire industrielle allemande, a entaché la réputation du premier constructeur automobile européen. A ce jour, le groupe qui détient 10 marques a versé plus de 32 milliards d’euros d’amendes, principalement aux Etats-Unis. C’est “la plus grande affaire de fraude, qui a coûté bien plus de 100 milliards d’euros aux actionnaires de VW et causé ainsi un préjudice immense”, commente à l’AFP l’analyste Ferdinand Dudenhöffer.

Le groupe a lancé un plan social historique en fin d’année dernière, prévoyant au moins trois fermetures d’usines en Allemagne et des dizaines de milliers de suppressions d’emplois. Le plan prévoit également la réduction de 10% de tous les salaires et leur gel en 2025 et 2026. Ces annonces ont entrainé une grève massive avec plus de 100 000 salariés mobilisés en décembre dernier. Toutefois, après une période morose en 2024 sur le plan financier, le géant semble rebondir notamment en Europe, où ses ventes de véhicules électriques ont grimpé de 157% au premier trimestre 2025. Volkswagen se place ainsi sur la première place du podium, détrônant Tesla et s’imposant comme le nouveau leader européen du marché des véhicules électriques. Une façon de tourner la sombre page que continue de représenter le Dieselgate ?

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