Publié le 20 août 2025

Étranglé par des milliers d’actions en justice et des pertes abyssales, Bayer, le géant allemand de l’agrochimie, pourrait renoncer au glyphosate, la molécule star – et très controversée – de l’un des herbicides les plus vendus au monde, le Roundup.

Le Roundup était son produit star. C’était même la raison pour laquelle le géant allemand Bayer avait racheté en 2016 l’américain Monsanto. Et c’est pourtant lui qui pourrait le faire tomber. Le 6 août dernier, lors de la conférence de résultats du géant de l’agrochimie, le président du directoire, Bill Anderson, a déclaré : “A moins que la situation ne change, nous allons devoir arrêter de produire du glyphosate parce que ce n’est tout simplement pas viable”. C’est la deuxième fois en quelques mois que Bill Anderson évoque cette piste. En avril, il avait ainsi expliqué qu’il était “impossible de continuer à commercialiser le produit comme nous l’avons fait dans le passé”.

Il faut dire que les résultats sont très mauvais pour Bayer. Le groupe a enregistré au deuxième trimestre une perte nette de 199 millions d’euros. C’est six fois plus que l’an dernier. Le géant allemand croule littéralement sous le poids des procédures judiciaires liées au glyphosate, molécule active du très controversé Roundup. Plus de 67 000 procès seraient ainsi en cours et plus de 10 milliards de dollars ont été versés par le groupe en raison de ces litiges.

Réduire le risque juridique

Pour Bayer, Monsanto rime avec fiasco. Depuis le rachat (pour 63 milliards de dollars !) du géant des OGM en 2016, c’est une descente aux enfers. L’allemand pensait pourtant avoir acquis un joyau stratégique. C’était sans compter le risque réputationnel de fusionner avec l’entreprise la plus mal-aimée du monde, “Monsatan” pour ses détracteurs, et le risque juridique porté par le glyphosate. Un risque largement sous-estimé par Bayer qui le paye au prix fort. Le groupe a chuté de plus de 80% en Bourse depuis 2015. Une dégringolade qui a valu sa place à Werner Wenning, ancien président de Bayer, architecte de l’opération. Il a laissé son poste en 2020 à Bill Anderson qui tente difficilement de redresser la barre.

L’objectif est de “réduire significativement le risque juridique d’ici 2026” a fait valoir le président du groupe le 6 août. En ligne de mire : le très attendu arrêt de la Cour suprême américaine qui pourrait mettre fin au supplice de Bayer. Le groupe lui demande d’annuler une des condamnations liées au glyphosate. Une décision favorable pourrait créer un précédent et réduire l’avalanche de procès. En attendant, Bayer a constitué une provision de 1,2 milliard d’euros pour couvrir les frais de litiges, en plus des 5,7 milliards déjà provisionnés.

En Europe, le glyphosate a de l’avenir

Mis sous pression par des investisseurs qui ont réclamé le démantèlement du groupe, Bill Anderson a par ailleurs choisi la voie de la “réorganisation”. Un “nouveau modèle organisationnel” qui s’est soldé par la suppression de 12 000 postes. L’objectif affiché est de simplifier la structure en réduisant le nombre de niveaux hiérarchiques, de réduire les coûts et d’améliorer l’efficacité. La branche française n’a pas échappé à cette stratégie. “Ce n’est pas aux salariés de payer pour les procès menés contre Monsanto aux Etats-Unis”, avait alors dénoncé le syndicat Force ouvrière.

Malgré les déboires de Bayer, le glyphosate, herbicide classé en 2015 comme “cancérogène probable” par le de Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) branche de l’Organisation mondiale de la santé, semble avoir de l’avenir. En tout cas en Europe. En novembre 2023, Bruxelles a ainsi décidé de renouveler l’autorisation du glyphosate pour dix ans dans l’Union européenne. En France, Emmanuel Macron, qui avait fait de l’interdiction du glyphosate l’une de ses promesses de campagne lors de son premier mandat, a finalement fait machine arrière.

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