Publié le 24 octobre 2018

SOCIAL

Boudée par les Français, la filière charcuterie doit monter en gamme... ou mourir

Trop grasse, trop salée, trop de nitrites, trop d'additifs... La planche de charcuterie ne fait plus rêver les Français. Le rayon accuse une baisse des ventes. Seule issue possible, la montée en gamme. En témoigne le succès des nouvelles offres bio ou labellisés des leaders comme Fleury Michon et Herta. Mais encore faut-il que les pratiques d'élevage et d'abattage évoluent pour monter durablement en qualité.

Le rayon charcuterie est boudé par les Français après des controverses autour des nitrites et des additifs soupçonnés d'être cancérigènes.
Pixabay

La charcuterie n’a décidément pas bonne presse. Alors que des soupçons pèsent sur un possible "cartel du jambon", soit une entente illégale de plusieurs industriels sur les prix, le marché est en perte de vitesse. Depuis 2015, le contexte est "morose" de l’aveu de Bernard Vallat, président de la Fédération professionnelle des charcutiers traiteurs (FICT).

"Il y a plusieurs facteurs à cette baisse. D’abord une vision qui évolue dans notre rapport à l’animal, surtout chez les jeunes qui sont de plus en plus flexitariens. Ensuite les produits de charcuterie et la viande en général ont fait l’objet de précaution officielle notamment sur la salaison, les nitrites ou encore les additifs", explique Bernard Vallat. En 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) avait notamment établi un lien entre la consommation de viande et certaines formes de cancer, notamment du côlon.

"Si on veut être encore là dans 20 ans, il faut monter en gamme"

"On a une opportunité historique, une responsabilité à prendre maintenant", lance le directeur marketing de Fleury Michon, David Garbous. "Si on veut être encore là dans 20 ans, il faut monter en gamme". D’où la nouvelle annonce du fabricant : d’ici 2020 les 181 références de charcuterie de l’industriel auront "un taux de sel inférieur de 25 % par rapport à la moyenne des produits de charcuterie".

Et la hausse de qualité fait vendre. Chez Fleury Michon, aujourd’hui, un jambon sur deux vendu est soit bio, soit Label Rouge, soit certifié sans OGM. "Les scandales alimentaires ont fait prendre conscience aux Français que tous les produits ne se valent pas", analyse David Garbous.

Cette tendance se vérifie chez les autres fabricants. "Depuis le début de l’année, on enregistre une baisse de 2 % en volume mais une hausse de 0,3 % en valeur. Les acheteurs consomment moins mais mieux", note Catherine Petilon, directrice marketing de Herta. Et le jambon sans nitrite est la nouvelle étoile montante. Il représente 30 % des ventes de la gamme. 

Du porc trop acide à cause des conditions d'élevage

Reste aux éleveurs à suivre le mouvement. Et pour l’instant, c’est assez compliqué. Le porc bio ne représente que 3 % de la production française. Les industriels se fournissent essentiellement au Danemark où la filière y est très développée. Et c’est aussi sur les conditions d’élevage et d’abattage que la France doit hausser le niveau. "Un produit sur deux que l’on reçoit est trop acide", avoue un industriel. "L’acidité provient du stress de l’animal", décrit-il.

En contrepartie de la loi sur les relations commerciales et d’un plan d’investissement, Emmanuel Macron a demandé aux filières agroalimentaires de se fixer une nouvelle stratégie. La FICT a donc lancé un plan d’actions pour "réenchanter" la filière. Objectif : "répondre aux attentes sociétales concernant le bien-être animal, jouer à fond la transparence et donner des garanties sur les aspects environnementaux", présente Bernard Vallat.

Mais ces ambitions s'avèrent pour l'instant difficile à appliquer. Selon un expert du secteur, elle mettrait à l'écart une trop grande partie des éleveurs français. Ce qui pousserait la Fédération à revoir à la baisse ses objectifs. 

Marina Fabre @fabre_marina 


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