Publié le 15 juillet 2014

GOUVERNANCE D'ENTREPRISE

Les colonies israéliennes : zone de controverses pour investisseurs éthiques

Peu de temps avant la reprise de la guerre entre Israël et le Hamas, l’Eglise presbytérienne américaine avait adopté une motion appelant à exclure de ses investissements trois entreprises pour leurs activités dans les territoires occupés. C'est un signe de plus que les violations des droits humains commises dans cette région conduisent certains investisseurs à mettre des entreprises sur liste noire. Une stratégie qui semble plus efficace auprès d’Israël que la diplomatie internationale.

Boycott BDS Israel Palestine apartheid
En Afrique du Sud, des manifestants comparent la situation des palestiniens à celle des noirs sous l’apartheid.
© HASSAN ISILOW / ANADOLU AGENCY

La décision remonte au 21 juin 2014. Aux Etats-Unis l’Eglise presbytérienne se prononçait pour l’exclusion de trois entreprises américaines : Motorola, Hewlett Packard et Caterpillar.

A l'origine de ce choix? Certaines de leurs activités en Israël et en Palestine dont les buts "ne sont pas pacifiques". Cette décision sur un sujet très sensible a donné lieu à un débat au sein de l’Eglise. A tel point que chaque mot de la déclaration publique a été soigneusement pesé.

L’église y réaffirme son engagement en faveur d'un dialogue œcuménique entre les religions et prend la peine de rappeler "qu'elle reconnait la complexité des enjeux, les décennies de combat, les souffrances qu’ont entrainées les politiques et les actions du gouvernement israélien comme des diverses entités palestiniennes". Elle a enfin pris soin de préciser que cette décision ne constituait pas un ralliement au mouvement BDS, pour Boycott, désinvestissement et sanctions. Lors des débats qui ont animé son assemblée générale annuelle, les opposants à cette décision ont expliqué que cela allait compromettre les relations avec la communauté juive, jusque-là excellentes.

Cet argument ne l’a finalement pas emporté puisque "beaucoup de Juifs sont aussi pour le désinvestissement", a précisé Ben Falter, délégué de l’église presbytérienne de Genève, ajoutant : "Si nous avons des points de vue différents, nos frères et sœurs juifs aussi."

 

Tensions avec des groupes américains pro-israéliens

 

Cela n’a pas empêché les groupes pro-israéliens américains de dénoncer la décision de l’Eglise presbytérienne, expliquant que cette liste noire créait un "climat d’hostilité ouverte". Pour Abraham Foxman, directeur national de la ligue anti-diffamation (ADL), "Cette résolution adresse un message de peine à tous les juifs américains et menace les relations très anciennes qu’ont nouées la communauté juive et l’Eglise presbytérienne".

L’église presbytérienne reproche à Caterpillar ses équipements spéciaux pour les bulldozers qui détruisent les maisons palestiniennes, à Motorola l’utilisation de systèmes de surveillance et d’équipement militaires dans les colonies et à Hewlett Packard les technologies qu’elle apporte au blocus naval de Gaza.

Ses investissements dans ces trois entreprises représentent 15,5 millions d’euros sur un portefeuille actions global de près de 500 millions d’euros. Avant de prendre la décision d’exclure ces trois sociétés, elle avait entamé des démarches d’engagement actionnarial auprès d’elles pour les faire renoncer à ces activités controversées. Leur refus a entrainé la décision d’exclusion.

 

Le choix difficile des investisseurs responsables

 

La situation dans les territoires occupés est une préoccupation importante pour les investisseurs soucieux de faire respecter les droits humains par les entreprises dont ils détiennent des actions.

Leurs décisions donnent lieu à des polémiques importantes comme l’a expérimenté le fonds de pension néerlandais PGGM quand il a décidé, en janvier 2014, d’exclure cinq banques israéliennes.

Israel ne veut en aucun cas être assimilée à l’Afrique du Sud de l’apartheid, placée sur liste noire en son temps, essentiellement parce que le boycott économique a joué un rôle clef dans le soutien au combat de Nelson Mandela.

Anne-Catherine Husson-Traore avec Jan Wagner pour Responsible investor.com
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