Publié le 22 mars 2018

GOUVERNANCE D'ENTREPRISE

Affaire Cambridge Analytica : Mark Zuckerberg, reconnaît avoir échoué à protéger les données des utilisateurs de Facebook

Quatre jours après la révélation de la faille de sécurité dans le réseau social Facebook qui a permis à l’entreprise Cambridge Analytica d’influencer le vote des électeurs américains, Mark Zuckerberg sort enfin de son silence. Il reconnaît des erreurs et avoir brisé la confiance des utilisateurs. Aux États-Unis, une campagne anti-Facebook prend de l’ampleur alors que des class-action se préparent.

Mark Zuckerberg est venu s'expliquer sur CNN sur l'affaire Cambridge Analytica.
@CNN

Facebook vit la pire crise de son histoire. Le cours de bourse de l’entreprise dégringole. La capitalisation boursière a fondu de 36 milliards de dollars de capitalisation… Le cataclysme provient de la révélation sur Cambridge Analytica. L’entreprise, qui a collaboré à la stratégie numérique du candidat Trump en 2016, a utilisé les données personnelles de 50 millions d'utilisateurs du réseau social prédire et d'influencer le vote des électeurs.

Il a fallu quatre jours à Mark Zuckerberg, fondateur et PDG, pour enfin sortir de son silence, d’abord sur sa page Facebook, puis à lors d’une interview pour CNN. "Nous avons la responsabilité de protéger vos données et si nous ne pouvons pas le faire, nous ne méritons pas de vous servir", écrit le jeune milliardaire. "Il y a une rupture de confiance entre Facebook et ceux qui partagent leurs données avec nous et qui s’attendent à ce que nous les protégions. Nous devons réparer cela", ajoute-t-il.

Quand c’est gratuit, le produit c’est vous

La crise rappelle surtout que les business de Facebook, ce sont les données de ses plus de deux milliards d’utilisateurs. Qui s'inscrit sur le réseau social est accueilli avec cette promesse : "Facebook, c'est gratuit, et ça le restera toujours". Le géant de la Silicon Valley génère ses profits - 16 milliards de dollars en 2017 – via la publicité. Elles pèsent pour 98,5 % du chiffre d'affaires de l'entreprise. Grâce aux "likes", aux commentaires, aux recherches, le réseau propose des publicités ciblées grâce aux données collectées. Cette collecte, tout à fait légale, est même configurée par défaut sur chaque compte utilisateurs.

"Facebook ne va pas chercher autre chose que ce que vous avez mis sur la toile. C'est l'utilisateur qui en est responsable", explique Gaspard Koenig, président du cercle de réflexion libéral GénérationLibre. Ce dernier plaide pour que la logique marchande soit étendue en donnant la possibilité aux usagers eux-mêmes de vendre leurs données. L'Union européenne a elle choisi une autre voie, celle d'une plus grande protection des informations personnelles, avec l'entrée en vigueur fin mai d'un règlement européen sur la question.

Une campagne de boycott du réseau social prend de l’ampleur outre-Atlantique, porté par le hashtahg #deletefacebook (supprimer Facebook). Parmi les voix qui portent : celle de Brian Acton, cofondateur de la messagerie WhatsApp rachetée en 2014 par Facebook. "Il est temps. #deletefacebook (…) Il est temps de se soucier de la vie privée", écrit-il sur Twitter.

Risque juridique

Des cabinets d'avocats américains ont déjà annoncé mercredi avoir déposé des plaintes et recours en nom collectif ("class action") au nom de citoyens et d'actionnaires. Celles-ci doivent toutefois encore être acceptées par un juge pour être instruites. Plusieurs enquêtes ont été ouvertes aux États-Unis par des régulateurs, et les procureurs de New York et du Massachusetts. De son côté, Mark Zuckerberg a annoncé qu’il est prêt à venir témoigner devant le Congrès américain.

Selon Anne-Catherine Husson Traoré, Directrice générale de Novethic : "Depuis cette crise, la protection des données personnelles n’est donc plus seulement un risque ESG (critères environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) émergent pour les géants du numérique. C’est devenu un risque financier et juridique bien réel dont il est un peu tôt pour évaluer le coût global sur un plan matériel et immatériel pour ce qui est de la réputation".

Ludovic Dupin avec AFP


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