Publié le 09 décembre 2019
ENVIRONNEMENT
Sous pression, Amazon va donner ses invendus au lieu de les détruire
Fini les trois millions d'invendus détruits l'année dernière ? Amazon, le géant du e-commerce, a annoncé automatiser le don des invendus stockés en France dès 2020. Une décision qui survient alors que l'entreprise est mise sous pression par les ONG et les pouvoirs publics. L'interdiction de destruction des invendus est en effet prévue dans la loi anti-gaspillage, bientôt débattue à l'Assemblée nationale.

© Álvaro Ibáñez/Wikimedia Commons
"Amazon, vendeur de destruction massive". Voilà comment Le Monde titrait son article à la veille d’un documentaire choc diffusé sur M6 en janvier concernant la gestion, par le géant du e-commerce, de ses invendus. Le mastodonte aurait jeté en 2018 plus de 3,2 millions d’objets manufacturés, selon les estimations d’élus CGT. Un an après, Amazon montre patte blanche.
"J’ai le plaisir de vous annoncer aujourd’hui que, dès 2020, nous allons mettre en place en France un nouveau programme qui s’appelle la donation expédiée par Amazon", a révélé sur RTL le 29 novembre le patron de la plateforme France Frédéric Duval. Contacté par Novethic, Amazon explique que ce programme "permet d’automatiser les donations de produits par défaut dès lors que les inventaires des vendeurs tiers sont stockés en France. Nous espérons ainsi réduire drastiquement les déchets de produits, avec pour objectif de ramener ce nombre aussi près que possible de zéro."
"Une communication de crise très orchestrée"
En septembre, Amazon avait annoncé le déploiement de ce programme mais seulement aux États-Unis et au Royaume-Uni. Le géant du e-commerce expliquait alors que la TVA en France posait problème car donner un invendu imposait aux vendeurs de s’acquitter de la TVA relative à ce produit. "Cette réglementation n’est pas économiquement viable pour des dizaines de milliers de TPE et de PME qui vendent directement leurs produits sur Amazon", avançait le groupe. Il dit s’être rapproché de plusieurs organisations caritatives comme le Secours Populaire, Relais ou l’Agence du don en nature.
Si les associations saluent cette annonce, elle la trouve bien tardive. "Cela fait plus de deux ans qu’on alerte sur la destruction massive des invendus. Cette annonce est issue d’une communication de crise très orchestrée", estime Alma Dufour des Amis de la Terre. Amazon traverse en effet une mauvaise période en France. Non pas en termes de ventes mais de réputation.
Plusieurs ONG et citoyens ont appelé à boycotter la plateforme à l’occasion du Black Friday pour dénoncer les pratiques de l’entreprise. Le mastodonte a été visé par deux rapports accablants. L’un des ONG Attac, les Amis de la Terre et Solidaire qui dénonce l’impact environnemental, social et fiscal de l’entreprise. L’autre du l’ancien secrétaire d’État au numérique, Mounir Mahjoubi, qui estime que pour "une création d’emploi" chez Amazon, "2,2 emplois" sont perdus "dans les commerces traditionnels".
Amazon va seulement respecter la loi
"Avec cette annonce d’automatisation des dons, Amazon veut se racheter une bonne image à bon compte", tacle Alma Dufour. "La politique d’Amazon est de réduire au maximum les coûts. Jusqu’ici, il n’avait juste pas envie d’avoir un service administratif de gestion des dons parce que cela prend du temps et de l’argent. Mais ils n’ont pas eu le choix", assure la chargée de campagne extraction et surproduction.
Amazon avait d’autant plus la pression que le projet de loi anti-gaspillage va être examiné à l’Assemblée à partir du 9 décembre. Il prévoit l’interdiction de destruction des invendus non alimentaires comme les vêtements, produits d’hygiène, produits électroménagers… "Les premières interdictions sont prévues dans les 12 mois de l’adoption de la loi", a rappelé dans un tweet, Brune Poirson, secrétaire d’État à la Transition écologique. Et d’ironiser "Merci à Amazon d’annoncer qu’elle compte la respecter".
La #LoiAntigaspillage prévoit l’interdiction de destruction des produits neufs invendus pour toutes les entreprises.
Les premières interdictions sont prévues dans les 12 mois de l’adoption de la loi.
Merci à Amazon d’annoncer qu’elle compte la respecter https://t.co/4vrkT7FYNC— Brune Poirson (brunepoirson) November 29, 2019
Marina Fabre, @fabre_marina