Publié le 06 octobre 2019
ENVIRONNEMENT
[Bonne nouvelle] Les marques ne pourront bientôt plus jeter ou brûler leurs invendus
Fini les vêtements neufs incinérés, les téléviseurs pas encore sortis de leur emballage et déjà jetés à la benne… le Sénat a adopté une des mesures phare du projet de loi économie circulaire interdisant la destruction des invendus par les entreprises. Si cette mesure est globalement saluée, son contenu essuie les critiques du côté des experts environnementaux mais aussi des entreprises.

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C’est une image qui a fait le tour des réseaux sociaux. Sur Twitter, une internaute a posté des photos d’une poubelle remplie de chaussures, a priori neuves, juste devant une boutique Go Sport. "Ça ne choque personne chez Go Sport de jeter des dizaines de paires de chaussures neuves et d’y mettre un coup de cutter pour être bien sûr que rien ne sera récupéré… Vive le gaspillage décomplexé", écrivait-elle.
— Mel (@Meleisha) September 17, 2019
Face au bad buzz, la chaîne Go sport a expliqué qu’il s’agissait de chaussures dépareillées et ou de pointures différentes "les rendant inutilisables, aussi bien au don qu’à la vente en magasin". Dans tous les cas, comme l’a relevé Burne Poirson, secrétaire d’État à la transition écologique, la destruction des produits invendus "sera bientôt hors la loi", tweetait elle le 18 septembre, "Une première mondiale".
Interdiction dès 2021 pour le textile et l'électronique
Quelques semaines plus tard, c’est chose faite. Le Sénat vient en effet d’approuver cette mesure du projet de loi économie circulaire. Un symbole. D’autant qu’à l’origine cette interdiction ne couvrait que les invendus vestimentaires. C’est Emmaüs qui avait lancé l’alerte en avril 2018 en demandant au gouvernement de combler le vide juridique actuel via une loi calquée sur celle du gaspillage alimentaire.
Le gouvernement a décidé d’élargir cette interdiction de jeter ou de brûler les invendus à tous les produits non alimentaires. Sont concernés les cosmétiques, les produits d’hygiène, les appareils électroniques… Au total, selon l’Agence du don en Nature, 800 millions d’euros de marchandises ont été invendus en France en 2019 mais seulement 140 millions donnés.
Les sénateurs ont introduit une sanction allant de 3 000 euros pour une personne physique à 15 000 euros pour une personne morale si la loi n’est pas respectée. Pour le secteur textile et électronique, cette obligation devrait entrer en vigueur fin 2021 puis être étendue à tous les secteurs fin 2023. Mais, si les acteurs associatifs et les experts saluent cette prise de conscience, le contenu de la loi est critiqué.
Les enseignes demandent aux associations de mieux recevoir leurs dons
"Le projet de loi ne change rien au droit actuel, il rappelle la hiérarchie des modes de traitement des déchets, c'est-à-dire réemployer, réutiliser ou recycler. On n'interdit pas aux entreprises de jeter leurs invendus et il n'est écrit nulle part, noir sur blanc, qu'on n'autorise pas l'incinération en dernier recours", taclait en juin Arnaud Gossement, avocat en droit de l'environnement.
Les enseignes elles, affirment avoir déjà pris à bras-le-corps le sujet de la gestion des invendus. Yohann Petiot, directeur de l’Alliance du commerce, qui regroupe 26 000 commerçants, affirmait il y a deux mois à Novethic que les volumes d’invendus étaient marginaux, représentant de 1 à 5 % des stocks. Surtout il défendait une autre mesure : "Puisqu’il y a une obligation à donner, nous défendons une obligation à recevoir".
Concrètement les enseignes estiment aujourd'hui que les associations doivent monter en compétence pour être en capacité de recevoir tous leurs invendus. De même, il y a un enjeu de traçabilité. "Aucune enseigne ne veut que ses propres produits entrent en concurrence avec sa marque. Les associations garantissent trop peu le respect de la propriété intellectuelle". Reste donc à savoir comment va s'appliquer concrètement cette nouvelle mesure dans le quotidien de ces secteurs.
Marina Fabre @fabre_marina