Publié le 06 juin 2019
ENVIRONNEMENT
La France appelle à une taxation du secteur aérien au niveau européen
[Mis à jour le 6 juin] Lors du Conseil des ministres des Transports de l'Union européenne, qui s'est tenu ce jeudi 6 juin, la France a appelé à une taxation du secteur aérien au niveau européen. En début de semaine, et alors qu'est discuté la loi Mobilité à l'Assemblée, le gouvernement avait promis de mener la bataille pour instaurer une taxe kérosène européenne sur les avions. Le secteur réagit en brandissant la menace de milliers d'emplois supprimés.

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[Mis à jour le 6 juin] Lors du Conseil des ministres des Transports de l'Union européenne, qui s'est tenu ce jeudi 6 juin, la France a fait savoir qu'elle lançait un appel en faveur d'une taxation du transport aérien à l'échelle européenne. La proposition est soutenue depuis plusieurs mois par quatre autres États, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la Suède. La Commission pourrait en tenir compte dans le cadre de la révision de la directive fiscalité de l’énergie.
En début de semaine, le gouvernement avait confirmé sa volonté de faire davantage contribuer le secteur aérien dans la lutte contre le changement climatique. "On veut mener la bataille pour appliquer une taxe kérosène sur les vols intra-européens", avait déclaré le ministre de la Transition écologique, François de Rugy, au micro de RMC. "Aujourd'hui, il y a une convention internationale qui date de 1944, à une époque où on ne parlait pas du climat, où on ne parlait pas de l'effet de serre. Il faut changer cette convention (...), c'est une priorité que nous donnons à la prochaine Commission européenne."
3 à 4 000 emplois menacés
Cette nouvelle annonce a provoqué la colère du secteur, de plus en plus visé ces derniers mois. Alors que le kérosène est exonéré de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE), la suppression de cet avantage coûterait "350 millions d'euros" et pourrait entraîner "3 000 à 4 000 suppressions d'emplois", a estimé Georges Daher, le délégué général de la Fédération nationale de l'aviation marchande (Fnam), sur Radio Classique.
Pour le seul groupe Air France, une taxation sur le kérosène représenterait "250 millions de dépenses supplémentaires", a-t-il ajouté. Les "compagnies françaises sont déjà défavorisées par rapport à d'autres compagnies européennes en termes de fiscalité et de taxation", a poursuivi le responsable de la Fnam, précisant que la part de marché des compagnies françaises en Europe "recule pratiquement d'un point par an depuis 10 à 15 ans".
Secteur carbo-neutre à partir de 2020
Dans le cadre de la loi Mobilités, débattu en ce moment à l’Assemblée nationale, les députés ont accepté, en commission, de créer une contribution, d'environ 30 millions d'euros annuels, prélevée sur les surplus de recettes de la taxe de solidarité sur les billets d'avion, dite "taxe Chirac", pour financer les autres modes de transport. Mais ils ont rejeté au niveau européen l'idée d'une taxe kérosène.
De son côté, l’OACI (Organisation internationale de l'aviation civile) s’est accordé sur la mise en place d’un mécanisme de compensation des émissions de CO2, baptisé Corsia. Il doit permettre au secteur d’être "carbo-neutre" à partir de 2020, c’est-à-dire que la croissance des émissions de CO2 par rapport aux niveaux de 2020 devra être compensée via des crédits carbone.
Une pétition a été lancée mi-mai pour imposer cette taxe kérosène. "Le secteur de l’aviation est l’une des sources d’émissions de gaz à effet de serre à plus forte croissance", écrivent ses auteurs. "Cette situation fausse la concurrence au détriment des trains fortement taxés." Si elle obtient un million de signatures, la Commission européenne sera dans l'obligation de se saisir de la question. De quoi accélérer le processus.
Concepcion Alvarez avec AFP