Publié le 13 mars 2019
ENVIRONNEMENT
Cinq États européens, dont la France, prêts à taxer le secteur aérien pour lutter contre le changement climatique
Ce n’est encore qu’une proposition mais elle a déjà reçu le soutien de cinq États membres de l’Union européenne, parmi lesquels la France. Il s’agit de mettre en place une taxation carbone sur le secteur aérien, pour l’instant épargné sur le plan environnemental. C’est notamment l’une des revendications portées par les Gilets jaunes et des ONG climatiques afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

@CC0
La France, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la Suède poussent pour une taxation du secteur aérien au niveau européen. Ce sont nos voisins belges qui ont mis le sujet à l’ordre du jour du dernier Conseil environnement européen, qui s’est tenu le 5 mars. Quelques semaines avant, les Pays-Bas avaient soutenu cette proposition lors du Conseil Écofin du 12 février.
Le secteur aérien doit contribuer pleinement à la lutte contre la pollution.
A Bruxelles, j’ai soutenu aujourd’hui aux côtés de la Belgique et des Pays-Bas des mesures visant par exemple à créer une taxe carbone sur les billets d’avion ou encore une taxe sur le kérosène. pic.twitter.com/ZvVnvVGNtI— Brune Poirson (@brunepoirson) 5 mars 2019
"J'ai été à Bruxelles la semaine dernière, et aux côtés des ministres de l'Environnement belge et des Pays-Bas, j'ai dit que la France soutenait leur position qui est d'envisager plusieurs pistes pour aller plus loin sur la contribution du secteur aérien à la lutte contre la pollution et pour taxer les émissions du secteur aérien. C'est une position que soutient la France", a confirmé Brune Poirson au micro de France Info.
Pas de taxe environnementale
Contrairement à ce qui est souvent dit, la France taxe largement le secteur - taxe Chirac pour l'aide au développement, TVA, taxe sur les nuisances sonores, la sûreté, la régulation - mais pas sur l'environnement. En cause, la convention internationale de Chicago sur l’aviation civile internationale, ratifiée en 1944, qui interdisait de taxer le kérosène pour ne pas entraver le développement du trafic international.
75 ans plus tard, les enjeux ne sont plus les mêmes. Le secteur aérien contribue à 2 % des émissions mondiales de CO2 et ce taux devrait dépasser les 20 % en 2050 selon les prévisions. Pour changer la donne, il faudrait un vote à l’unanimité des 191 membres de l’Organisation internationale de l’aviation civile (OACI). Mais certains pays comme le Japon, la Norvège, les États-Unis, le Brésil, la Suisse et les Pays-Bas ont déjà instauré des taxes sur le kérosène pour les vols domestiques. Une coalition de pays pourrait dès lors lever ces exemptions sur leurs territoires.
Secteur neutre en carbone à partir de 2020
Au niveau européen, les émissions des trajets entre les États membres sont comprises dans le marché carbone. La proposition actuellement dans les cartons propose d’aller plus loin en instaurant une taxe sur le kérosène ou sur les billets d’avion. La Commission tiendra compte de cette question dans le cadre de la révision de la directive fiscalité de l’énergie. Les Pays-Bas prévoient par ailleurs d’accueillir une conférence de haut niveau sur le sujet les 21 et 22 juin.
De son côté, l’OACI s’est accordé sur la mise en place d’un mécanisme de compensation des émissions de CO2, baptisé Corsia. Il doit permettre au secteur d’être "carbo-neutre" à partir de 2020, c’est-à-dire que la croissance des émissions de CO2 par rapport aux niveaux de 2020 devra être compensée. Concrètement, les compagnies aériennes pourront acheter des crédits carbone auprès d’autres secteurs, via une bourse d’échange pour compenser leurs émissions. Le système est graduel : il se fera sur une base volontaire de 2021 à 2026 (avec une phase pilote de 2012 à 2013), puis deviendra obligatoire à partir de 2027 et jusqu'en 2035.
Concepcion Alvarez, @conce1