Publié le 02 octobre 2023
ENVIRONNEMENT
A69, Artificialisation des sols : Les régions font-elles de la résistance à la planification écologique ?
Quelques jours après le lancement de la planification écologique à la française par Emmanuel Macron, Laurent Wauquiez président de la Région Rhône-Alpes, entre en résistance en refusant d’appliquer la loi Zero Artificialisation Nette (ZAN) des sols. De son côté, la présidente de la Région Occitanie confirme son soutien à l’A69. Or les régions sont un échelon indispensable au déploiement de la planification écologique qui a besoin de leur soutien. Baroud d’honneur ou vrai coup de frein ?

LIONEL BONAVENTURE / AFP
La planification écologique est en train de devenir un vrai facteur de clivage politique, plutôt pour la freiner à ce stade. À droite comme à gauche certains élus continuent à croire que les électeurs sont majoritairement contre. C’est en tout cas le pari de deux présidents de régions emblématiques. À droite Laurent Wauquiez qui devant l’Association des maires ruraux annonce vouloir faire de la région qu’il dirige une ZAD (Zone à Défendre) de la ZAN (Zero Artificialisation Nette). Concrètement il fait comme s’il pouvait s’affranchir d’appliquer la loi qui fixe le cap de Zero Artificalisation Nette des sols en France pour 2050.
Typique de ce qui tue notre pays : des règles, des normes, toujours plus de lourdeur administrative et, à l’arrivée, on ne peut plus rien faire. Arrêtons cette technocratie.https://t.co/nTsqNsGsIb
— Laurent Wauquiez (@laurentwauquiez) September 30, 2023
Laurent Wauquiez semble oublier deux choses : cette loi est destinée à protéger la biodiversité et donc le capital des maires ruraux qui ont applaudi son idée, et sa proposition est complètement illégale. S’il la met en œuvre le préfet de Région reprendra les rênes pour que la loi soit appliquée en Rhône Alpes comme ailleurs. Pour mieux la tourner en ridicule l’avocat spécialiste de l’environnement Arnaud Gossement a fait une contreproposition : en finir avec le changement climatique et la destruction de la biodiversité.
Le mieux serait même de sortir du changement climatique et de l’effondrement de la biodiversité.
Zéro artificialisation nette : Laurent Wauquiez annonce que la région Auvergne-Rhône-Alpes se retire du dispositif https://t.co/00kzBcdzRn— Arnaud Gossement (@ArnaudGossement) September 30, 2023
Cette vraie fausse annonce politique, reprise un peu partout ce week-end, contribue à semer la confusion en jetant le doute sur les bénéfices que doit apporter la planification écologique quelques jours seulement après son annonce officielle.
Résistance
Les Régions sont un maillon indispensable pour que la planification écologique se déploie suffisamment rapidement afin d'espérer que la France puisse tenir ses objectifs climatiques et environnementaux. Chacune a des caractéristiques et des problématiques différentes, à la fois sur le climat et la biodiversité mais si leurs président(e)s ne jouent pas le jeu, l’agenda aura du mal à être respecté. Car dans une région voisine Carole Delga, la présidente socialiste d’Occitanie, incarne elle aussi la résistance à ses nouveaux modèles plus durables. Elle "croit à l’avion vert" et apporte son soutien indéfectible au projet d’extension de l’A69 dont elle estime qu’il est "la seule possibilité de désenclaver la région".
Carole Delga devrait rencontrer des jours-ci les opposants au projet qui font le siège devant le Conseil Régional à Toulouse mais ils ont posé des conditions : que les travaux soient arrêtés, qu’un représentant du Ministère des Transports assiste à la réunion et que l’évènement soit médiatisé. Ils font monter la pression d’autant plus que Thomas Brail, le gréviste de la faim devenu le symbole de cette lutte, annonce qu’il est prêt à mourir pour la protection des arbres centenaires que le futur tronçon de l’A69 doit faire disparaitre.
Repenser les modèles
La réforme des régions de 2014 qui a fait passer leur nombre de 22 à 14 en a fait de vastes territoires où cohabitent plus ou moins bien deux visions du développement économique. L’une est portée par des élus qui défendent le modèle des années 80 basant la prospérité des territoires sur le développement des infrastructures routières et aéroportuaires, à l’image du "pack" de la CCI du Tarn, farouchement pro A69.
Il n'y aura pas de moratoire sur autoroute #A69 ni suspension des travaux, j'en ai eu l'assurance de @Elisabeth_Borne et @CBeaune
Le pack tarnais, élus, entrepreneurs, citoyens, ne cédera jamais @CCI_du_Tarn @ramond_christ CMA Tarn @Occitanie @autorouttarnsud @OlivierFabreMzt pic.twitter.com/Rocl3jDDo3— Jean Terlier (@JeanTerlier) September 22, 2023
L’autre est plutôt tournée vers d’autres modèles qui s’appuient sur les liens établis par le TGV. Il a fait suffisamment évoluer les grandes métropoles comme Bordeaux ou Lyon pour qu’elles aient élus des maires écologistes en 2020. Mais quelle que soient les convictions politiques, les faits sont têtus. Les transports représentent, selon le Haut Conseil pour le Climat, 32 % des émissions de gaz à effet de serre de la France. Il est donc impératif de les repenser pour tenir les engagements de neutralité carbone, français et européens.
Anne-Catherine Husson-Traore, directrice des publications de Novethic