Publié le 27 avril 2020
ENVIRONNEMENT
La Commission européenne doit sauver le Green Deal, menacé par la crise du Coronavirus
Une nouvelle ère, plus respectueuse du climat, devait s'ouvrir en Europe sur la base d'un Pacte vert, Green Deal, porté par le nouvel exécutif européen. Mais la crise du coronavirus est en train de doucher les belles intentions de la Présidente Ursula von der Leyen en raison des impacts économiques inédits qu'il provoque.

@JohnThys/AFP
C’est le premier grand rendez-vous de l’année consacré au climat. Le Dialogue de Petersberg, qui se tient ces 27 et 28 avril sous l'égide de l’Allemagne – par visioconférence –, doit réunir une trentaine de ministres et de négociateurs ainsi que le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. Cet événement est d’autant plus important que la COP26 de Glasgow sur le climat a été reportée en 2021, en raison du coronavirus. L’Allemagne, pays hôte et future présidente du Conseil de l’UE, devra envoyer un signal fort sur la nécessité de placer le climat au cœur des plans de relance de l’économie mondiale, estiment plusieurs ONG.
"Le dialogue de Petersberg doit permettre à tous les États de réaffirmer leur volonté pour que les plans de relance soient justes, verts et qu’ils soient tournés vers les populations les plus vulnérables", explique Jennifer Morgan, la directrice exécutive de Greenpeace International. "Angela Merkel doit s’appuyer sur la science du climat, comme elle a su s’appuyer sur la science pour gérer la crise du coronavirus", ajoute-t-elle. "Le Green deal doit servir de cadre et conditionner tous les investissements dans les plans de relance" complète Christoph Bals, directeur de Germanwatch.
Les entreprises à l’offensive
Pour l’instant, le Green Deal est passé au second plan face à l’urgence de la situation. Et les chantiers sur la biodiversité, l’agriculture ou la déforestation ont été retardés de quelques semaines. L’exécutif européen envisagerait même de repousser la date à laquelle il doit proposer de nouveaux objectifs de réduction des émissions de CO2 pour 2030. Une étude d’impact doit être rendue d’ici l’été et une décision prise à l’automne. Mais tout ce calendrier pourrait être repoussé pour "nous permettre de consacrer plus de temps à un exercice d’analyse complexe", indique un document de la Commission révélé par Contexte.
La crise du coronavirus aura également permis de redonner de la voix aux opposants du Green Deal. Dès le début, des ministres tchèques et polonais ont demandé à mettre de côté le Pacte vert et à suspendre le marché carbone. L’offensive a été suivie par plusieurs fédérations d’entreprises dans les secteurs de l’automobile, du plastique ou encore de l’aéronautique pour retarder ou même abandonner certaines directives environnementales. En France, l’Afep, qui représente les plus grandes entreprises du pays, consulte ses membres pour demander une adaptation du calendrier politique.
"Le Green Deal n’est pas un luxe"
Pour l'instant, l'exécutif européen tient bon. En amont du sommet européen du 23 avril sur le plan de relance, le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans a publiquement pris la parole pour défendre le Green Deal. "Ne tombons pas dans le piège de penser que le Pacte vert est un luxe que nous ne pouvons pas nous offrir pendant cette crise", a-t-il lancé. Avant lui, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, a rappelé que "le green deal est la bonne réponse à la crise." "Mener le green deal, c’est investir dans la résilience de l’Union européenne" a-t-elle assuré. 17 ministres de l'environnement européens, dont la France et l'Allemagne, se sont eux aussi prononcés en ce sens.
De nombreux eurodéputés, ainsi que des responsables d'ONG et d'entreprises, ont également signé un appel à une relance verte après l'épidémie, à l’initiative de Pascal Canfin. "L'argent public que l'on va réinjecter dans ces secteurs pour aider les entreprises devra pouvoir accélérer leur transition écologique. On ne peut pas réinjecter de l'argent sans raison comme on l'a fait en 2008", explique l’eurodéputé dans une interview au Point. Mi-avril, le Parlement européen a adopté une résolution - non contraignante – en ce sens.
"Depuis le début de l’épidémie du COVID19, les compagnies aériennes européennes ont déjà négocié au moins 12,8 milliards d'euros d’aides de la part des gouvernements européens, sans qu’aucune condition environnementale contraignante n’y soit associée", déplore Greenpeace. Le prochain test est prévu courant mai quand la Commission européenne présentera aux États un plan de relance. Quelle place y occupera le climat et comment s'en suivront les discussions alors que les États peinent déjà à s'accorder sur un effort de solidarité face à la crise du coronavirus ?
Concepcion Alvarez, @conce1