Publié le 09 février 2022
ÉNERGIE
La Cour des comptes européenne appelle les 27 États membres à réduire les subventions aux énergies fossiles
C'est une recommandation forte de la Cour des comptes européenne. L'institution appelle l'Union européenne à réduire les subventions aux énergies fossiles, constatant que ces aides ne diminuent pas au fil des années. Elle regrette que, dans de nombreux pays dont la France, ces aides se révèlent même plus avantageuses pour les énergies fossiles que pour les renouvelables. La fiscalité actuelle de l’énergie n’est pas compatible avec les ambitions climatiques de l’UE, déplore-t-elle.

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La fiscalité des pays européens n’est pas calibrée pour lutter contre le réchauffement climatique. Ce constat n’émane pas d’une ONG engagée mais d’un rapport de la Cour des comptes européenne. Les politiques fiscales des Européens "ne cadrent pas avec leurs objectifs climatiques", scande ainsi l’instance. "Si les subventions aux énergies renouvelables ont presque quadruplé entre 2008 et 2019, celles en faveur des combustibles fossiles sont restées relativement stables, malgré l'engagement de la Commission européenne et de certains Etats membres de les supprimer progressivement", notent également les auteurs du rapport.
Ces aides accordées aux combustibles fossiles par les États membres atteignent en effet de 55 à 58 milliards d'euros par an entre 2008 et 2019, dont environ deux tiers en exonérations fiscales, calcule l’institution. De plus, elle regrette que certains Etats maintiennent les taxes sur les carburants "à un niveau proche des minima établis" par la réglementation européenne. Résultat, les combustibles fossiles sont parfois "considérablement moins imposés que l'électricité", notamment dans quinze pays dont la Finlande, l'Irlande, la France ou la Belgique.
Cette fiscalité rend donc l’énergie propre et les technologies à faible consommation d’énergie "relativement plus onéreuses". Cela peut "compromettre l’efficacité du marché carbone et freiner la transition énergétique", prévient ainsi la Cour. Cette situation risque en effet "d'accroître les risques de 'verrouillage' des investissements" dans des infrastructures polluantes.
Un sujet sensible dans un contexte de flambée des prix
Ces politiques fiscales pourraient ainsi mettre en péril la réalisation des objectifs du Vieux-Continent pour contenir le réchauffement. En effet, l’UE s’est engagée à réduire de 55% ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Or le charbon, l'énergie la plus polluante, est dans certains pays moins taxé que le gaz naturel. L'instance rappelle par ailleurs que ces énergies affectent la santé publique.
La Cour des comptes européenne appelle donc à taxer davantage les énergies fossiles. Certains pays comme l'Allemagne, la République tchèque, l'Espagne et l'Italie favorisent déjà les renouvelables par rapport aux fossiles. Cet appel fait écho à celui de l'Agence Internationale de l'Energie. "En l'absence d'action politique majeure de la part des gouvernements, les émissions devraient rester à peu près au même niveau au cours des trois prochaines années. Non seulement cela met en évidence à quel point nous sommes actuellement loin de la voie vers la neutralité carbone d'ici 2050, mais cela souligne également les changements massifs nécessaires pour que le secteur de l'électricité remplisse son rôle essentiel dans la décarbonation du système énergétique au sens large" a déclaré Fatih Birol, le directeur de l’AIE dans son dernier rapport semestriel.
La Cour des comptes européenne reconnait toutefois que le sujet est particulièrement sensible en ce moment. Dans un contexte de flambée des prix de l'énergie, ce budget peut en effet représenter plus de 20% des revenus des ménages, rappelle la Cour. Or ces subventions profitent aux fournisseurs d’énergie, aux industriels, au secteur des transports, aux agriculteurs mais aussi directement aux ménages. L'institution recommande ainsi "la réduction de taxes" sur d'autres dépenses des ménages et la mise en place de "mesures de redistribution" en leur faveur.
Mathilde Golla @Mathgolla avec AFP