Ce n’est pas une surprise, mais le vent contraire qui souffle sur l’éolien en mer aux États-Unis se transforme en véritable tempête politique. Le 22 août, l’administration Trump a ordonné l’arrêt immédiat des travaux d’un immense parc éolien en mer, baptisé Revolution Wind, situé au large de la côte nord-est. Ce projet, porté par le groupe danois Ørsted, était pourtant achevé à plus de 80% : toutes les fondations avaient été installées en mer, et 45 des 65 éoliennes prévues étaient déjà en place, selon un communiqué de l’entreprise.
“Nous respectons l’injonction et allons travailler avec nos partenaires et les parties prenantes américaines pour trouver une solution dès que possible”, a déclaré Rasmus Errboe, directeur général d’Ørsted, dont l’actionnaire majoritaire est l’État danois. “L’objectif reste de finaliser ce projet et de contribuer à répondre à la demande croissante d’électricité aux États-Unis.”
Mais la décision du gouvernement américain frappe durement Ørsted. Le numéro un mondial des éoliennes a plongé en Bourse de plus de 16% enregistrant une chute historique après avoir déjà dévissé de 30% quelques semaines plus tôt. Pour faire face aux conséquences financières du gel des projets en mer, Ørsted a annoncé une levée de 60 milliards de couronnes danoises (environ 8 milliards d’euros) via une émission de titres. Déjà en 2023, Ørsted avait accusé une perte de 4 milliards de dollars liée à l’annulation de plusieurs projets similaires outre-Atlantique, un marché pourtant stratégique pour le groupe.
Les éoliennes, “l’arnaque du siècle”
Ce nouveau revers pour l’éolien offshore américain s’inscrit dans une offensive plus large. La veille, le 21 août, l’administration Trump avait annoncé le lancement d’une enquête sur les importations de composants pour éoliennes, évoquant une possible application de droits de douane punitifs. Cette démarche pourrait désorganiser l’ensemble de la filière, encore dépendante de fournisseurs étrangers pour ses équipements.
Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump multiplie les gestes hostiles envers les énergies renouvelables, avec en ligne de mire l’éolien, qu’il critique avec virulence depuis des années. “Les éoliennes, stupides et laides, sont en train de tuer le New Jersey”, a-t-il par exemple martelé mardi 19 août, sur sa plateforme Truth Social. “Tout État qui a construit et misé sur des éoliennes et l’énergie solaire pour s’approvisionner voit des augmentations record des coûts d’électricité et d’énergie. L’arnaque du siècle“, a-t-il encore déclaré le lendemain, mercredi 21 août.
Un coup brutal pour le secteur
Face à cette hostilité présidentielle, les acteurs de l’éolien redoutent un coup d’arrêt brutal pour l’ensemble du secteur aux États-Unis. Plusieurs projets offshore sur la côte Est et dans le Golfe du Mexique sont désormais à l’étude ou en phase de préconstruction, mais l’incertitude réglementaire et les menaces de taxation jettent un froid sur les investissements.
Cette politique pro-fossile, portée par Trump et ses alliés républicains, marque un revirement par rapport à la précédente administration Biden, qui avait fait des renouvelables un pilier de sa stratégie climatique. Les crédits d’impôt du Inflation Reduction Act (IRA), adopté en 2022, avaient enclenché une dynamique sans précédent dans les énergies vertes. Mais depuis janvier 2025, cette impulsion est stoppée net. Le retrait forcé d’Ørsted envoie un signal clair : sous Donald Trump, l’Amérique tourne le dos à la transition énergétique, au risque de perdre son avantage dans une industrie stratégique pour les décennies à venir.