Publié le 04 avril 2017
ÉNERGIE
Énergies renouvelables : le crowdfunding est-il fiable ?
En quelques années, les projets d’énergies renouvelables financés par des plateformes participatives ont considérablement augmenté. Entre investisseurs particuliers en quête de sens et entreprises qui souhaitent favoriser l’adhésion de projets d’énergies renouvelables, une dynamique est lancée. Mais ces plateformes sont-elles fiables ?

PASCAL GUYOT / AFP
Les projets d’énergies renouvelables financés par des plateformes participatives ne cessent d’augmenter. "Il y a une véritable dynamique, une progression significative", estime Stéphanie Savel, vice-présidente de l’association Financement Participatif France. Selon la société Solar Plaza, consacrée à l’essor des énergies renouvelables, de 2009 à 2015, 300 projets dans les énergies renouvelables ont été financés en France par des plateformes spécialisées pour un montant de 165 millions d’euros.
L’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la Maîtrise de l’Énergie, comptait, en 2015, plus de 150 projets financés par des particuliers soit 3% de la puissance installée dans l’éolien en France et 0,7% du photovoltaïque. Cela paraît peu mais ces projets issus d’un financement participatif n’étaient qu’une poignée les années auparavant.
Les raisons sont multiples : les particuliers cherchent à investir dans des projets qui "ont du sens", les entreprises à favoriser l’adhésion, voire l’acceptabilité de leurs projets auprès des riverains. Lumo, Energie Partagée, Lendopolis, Enerfip, Lendosphère… les plateformes de financement participatif dédiées à l’environnement répondent à leurs attentes. Solar Plaza en dénombre trois spécifiquement destinées aux énergies renouvelables. D’autres plateformes, plus généralistes, se mettent au vert. C’est notamment le cas de WiSEED qui proposent des projets d’énergies renouvelables mais aussi des projets de reforestation et de cultures durables.
Des projets moins risqués ?
La concurrence due au développement de ces plateformes rend-elle les projets plus risqués ? En France, pas encore, estime Eric Sotto d’AkuoEnergy, mais à l’étranger, essentiellement au Royaume-Uni, la course aux projets entraîne une baisse de qualité et logiquement une hausse des défaillances.
Le premier critère reste celui de la "maturité du projet", explique Eric Sotto. Sur certaines plateformes, les projets d’énergies renouvelables proposés n’ont pas encore de permis de construction ou d’autorisation des collectivités. Ce qui resprésente un risque élevé pour les particuliers. C'est notamment pour cela qu'AkuoEnergy a lancé Akuocoop, sa propre plateforme de financement participatif en mars 2017. "Les projets proposés sont peu risqués, car déjà en construction ou en fonctionnement", souligne Eric Sotto, "c’était aussi un risque réputationnel pour nous de proposer nos projets sur des plateformes pas assez rigoureuses".
Pour autant, de manière générale, les projets d’énergies renouvelables peuvent être "moins risqués que d’autres car les technologies sont mûres, selon Stéphanie Savel de l’association Financement Participatif France. L’éolien et l’hydraulique ont fait leur preuve. La biomasse pose encore question mais cela reste relativement limité".
Un Label environnement pour plus de traçabilité
Mais la question de la traçabilité pose problème. Comment savoir si son argent est bien destiné à la construction de cette éolienne dans le Larzac ? Quel est l’impact environnemental de son investissement ? Certaines plateformes, comme Lumo, indiquent sur leur site le nombre de kilowatteurs par an produit par tel ou tel projet et traduisent concrètement son impact. Le projet de serres solaires à Torreilles dans les Pyrénées-Orientales produit par exemple 14 000 000 kWh / an soit la "consommation de 5185 foyers". Mais ces données ne sont pas toujours transmises.
Pour y voir plus clair, le ministère de l’Environnement a annoncé en septembre dernier la création d’un "label environnement" dédié aux plateformes de financement participatif de la "croissance verte". Le décret d'application* a été signé par Ségolène Royal le 7 avril. Le but ? "garantir au financeur une transparence de l’information ainsi que la qualité environnementale des projets".
Concrètement, il s’agit de transmettre aux investisseurs, pendant et après la levée de fonds, des documents clés, un suivi de projet sur la durée, de créer un espace dédié aux commentaires, d’organiser des réunions avec le porteur de projet etc. Autre enjeu : mesurer réellement l’impact du projet grâce à des indicateurs dans "les domaines du changement climatique, de l’eau, de l’économie circulaire et de la biodiversité". En bref, sur la qualité environnementale du projet. Reste à le concrétiser. Les premiers projets devraient être labellisés au premier semestre 2017.
*Mise à jour le 10 avril à 17h