Publié le 19 octobre 2020
ÉNERGIE
Le gouvernement instaure un malus sur le poids des véhicules et exclut le diesel de la prime à la conversion
La confrontation durait depuis plusieurs semaines entre Bercy et le ministère de la Transition. Finalement, c'est le second qui aura eu raison sur deux mesures. La première est l'introduction d'un malus sur le poids des voitures, qui devrait (un peu) pénaliser les SUV. La seconde est la sortie des diesels de la prime à la conversion. Ces dispositions, dont la portée reste limitée, permettent néanmoins de reverdir la ligne de l'exécutif qui vient d'essuyer de nombreuses critiques.

@CC0
Deux victoires coup sur coup, obtenues de justesse par Barbara Pompili au nez de Bercy. Malmenée sur les néonicotinoïdes, la ministre de la Transition écologique a obtenu l'accord de Matignon sur deux mesures - plus symboliques qu'impactantes - concernant l’automobile. Tout d'abord, le Premier ministre a finalement cédé sur l'instauration d’un malus poids, une demande de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). Un amendement au Projet de loi de Finances 2021 va être déposé dans les prochains jours.
Le gouvernement, qui avait dans un premier temps opté pour un durcissement du malus et un doublement de son plafond, propose d’y ajouter un critère lié au poids à partir de 1,8 tonne - contre un seuil de 1,4 tonne proposé par la CCC. Cela ne toucherait que 2 % des ventes de voitures neuves, mais au moins la discussion, jusqu'ici bloquée, est lancée. En ligne de mire, les SUV, véhicules très lourds qui ont envahi nos routes et dont les ventes ont été multipliées par sept en dix ans.
Les SUV dans la ligne de mire
Alors que les émissions de CO2 des véhicules avaient diminué sans discontinuer entre 2009 et 2016, elles sont reparties à la hausse depuis 2016 malgré les efforts des constructeurs. En cause, l’augmentation du poids moyen des véhicules et de leurs puissances due à l’essor des SUV. Selon le WWF (1), ces derniers représentent la 2e source de croissance des émissions françaises, juste derrière le secteur aérien au cours des dix dernières années. L’empreinte carbone d’un SUV thermique sur l’ensemble de son cycle de vie est près de cinq fois plus importante que celle d’une berline électrique parcourant le même nombre de kilomètres. Et plus globalement, ils émettent en moyenne 20 % de gaz à effet de serre de plus que le reste des voitures.
Pourtant, jusqu’à maintenant, les SUV n’étaient que peu pénalisés puisque le malus ne dépendait que des émissions mesurées à l’échappement et ne prenait pas en compte l'énergie nécessaire pour leur fabrication ou pour les faire rouler. Son montant était également peu dissuasif : seules 5 % des voitures vendues avaient un malus supérieur à 1 000 euros en 2019, pour un prix moyen d’achat de 20 000 euros. L’industrie automobile française devrait toutefois être peu impactée puisque Renault et PSA vendent des véhicules en moyenne plus légers que leurs concurrents étrangers. En outre, les véhicules électriques et hybrides rechargeables seront exonérés du malus poids, malgré leur empreinte carbone plus importante.
Caractéristiques des principaux segments automobiles. @WWF
Le diesel exclu de la prime à la conversion
La seconde mesure du gouvernement concerne l'exclusion des véhicules diesels et certains modèles essences de la prime à la conversion à partir du 1er janvier. Pris contre l'avis de Bercy, cela concerne environ 10 % des primes versées. Jusqu'à présent, le dispositif permettait de financer des voitures diesel avec lesquelles les ménages ne pourront plus accéder à certaines zones urbaines à court terme, comme ce sera le cas par exemple dans le Grand Paris à partir de 2024.
Enfin, un bonus écologique de 1 000 euros pour l'achat d'un véhicule électrique d'occasion, catégorie jusqu’à présent exclue du dispositif, va voir le jour. De quoi peut-être booster le marché alors que les automobiles électriques ne représentaient en juillet 2020 qu’1 % des voitures mises en vente sur le site de l’Argus, et démocratiser le bonus écologique qui était avant tout "une aide orientée vers les ménages les plus aisés" selon le RAC (2). Au total, dans le cadre du plan de relance, le gouvernement a l'intention de consacrer 1,9 milliard d'euros pour soutenir la demande en véhicules propres.
Concepcion Alvarez @conce1
(1) Voir l'étude du WWF sur l'impact des SUV sur le climat
(2) Voir l'étude du RAC sur les aides à l'achat de véhicules