Publié le 6 juin 2025

En procès pour publicité commerciale trompeuse, TotalEnergies était devant les juges jeudi 5 juin à Paris. La major pétrolière a tenté de répondre sur la forme plutôt que sur le fond, à la plainte d’associations, qui l’accusent de greenwashing.

Le feuilleton des actions en justice menées contre TotalEnergies continue. Le géant pétrolier, déjà assigné pour son inaction climatique et pour les impacts climatiques et sociaux de ses projets Eacop et Tilenga en Afrique de l’Est, est maintenant devant les juges pour greenwashing et publicité mensongère. C’est un collectif d’associations composé des Amis de la Terre France, de Greenpeace France et de Notre Affaire à Tous, avec le soutien de l’association ClientEarth, qui a assigné l’entreprise en justice en 2022 pour pratiques commerciales.

Elles arguent que le géant des énergies fossiles diffuse des publicités mensongères, susceptibles de tromper ses consommateurs, en se présentant comme “un acteur majeur de la transition énergétique”, engagé pour la “neutralité carbone” et la lutte contre le réchauffement climatique. Devant le juge, jeudi 5 juin, l’entreprise a fait face aux argumentaires des associations, qui rappellent que l’écrasante majorité de ses activités et de ses investissements concernent les énergies fossiles, les plus émettrices de gaz à effet de serre.

Des communications susceptibles de “tromper” le consommateur

Dans leur assignation, les plaignants montrent ainsi comment, depuis quelques années, la communication de TotalEnergies s’est largement concentrée sur ses activités dans les énergies renouvelables et sur sa contribution “prétendue” à la transition énergétique et climatique, sans que la stratégie du groupe ne soit alignée avec ses allégations. “La major continue de lancer de nouveaux champs pétroliers et gaziers, alors que le constat scientifique est clair : c’est incompatible avec l’objectif de l’accord de Paris de limiter le réchauffement à 1,5 °C et avec un objectif de neutralité carbone en 2050″ explique ainsi le collectif.

Les plaignants dénoncent également la confusion entretenue par TotalEnergies au sujet du gaz naturel fossile, que le groupe présente comme une énergie “de transition”, au service de la transition énergétique : “le gaz est une énergie fossile polluante, comme le charbon et le pétrole” expliquent-ils. “TotalEnergies n’a pas recours au gaz comme une simple énergie “de transition” mais vise au contraire à en développer massivement l’exploitation, au risque de verrouiller notre dépendance aux énergies fossiles”, argumentent les associations.

En multipliant les communications sur tous les supports, à la télévision, sur son site internet ou sur les réseaux sociaux, la major pétrolière contribuerait à tromper les consommateurs. Plusieurs tribunes publiées par des collectifs associatifs et scientifiques ont ainsi ces dernières années dénoncé le double discours de TotalEnergies, qui continue pourtant à se concentrer sur les énergies fossiles, comme le rappelait son dirigeant Patrick Pouyanné lors de l’assemblée générale du groupe le 23 mai dernier.

Des communications “institutionnelles” pour TotalEnergies

Devant les juges, les avocats du géant pétrolier ont tenté de contester ces accusations, arguant notamment du caractère “institutionnel” des communications du groupe. Pour l’avocate du groupe, Maître Françoise Labrousse, les spots présentant TotalEnergies comme un acteur de la transition énergétique, ou vantant ses investissements dans les énergies bas carbone, seraient non pas destinés au consommateur, mais à l’ensemble des “parties prenantes” du groupe : investisseurs, actionnaires, partenaires institutionnels… “La communication institutionnelle par essence ne relève pas du champ des pratiques commerciales trompeuses” a ainsi expliqué l’avocate, argumentant sur la forme plutôt que sur le fond.

Tentant d’évacuer les accusations de greenwashing, les avocats ont également fait valoir que les communications du groupe parlent “d’ambition” en matière de transition énergétique, et non pas d’engagement. Les recommandations de l’Ademe en matière de greenwashing indiquent pourtant justement que l’usage de termes vagues en matière environnementale contribue à la mauvaise information des consommateurs. Ces arguments sauront-ils convaincre les juges ? Ces derniers devraient se prononcer le 23 octobre prochain, après avoir examiné les arguments et plaidoiries des parties.

En attendant, TotalEnergies vient justement d’être condamné au Royaume-Uni par l’autorité de régulation de la publicité, qui estimait que les publicités du groupe, en ne rappelant pas ses engagements dans les énergies fossiles, étaient susceptibles de tromper les consommateurs.

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